Vapotage et problèmes respiratoires : voyons-nous seulement la pointe de l’iceberg?

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Avec la popularité grandissante du vapotage, en particulier chez les jeunes, de plus en plus de voix s’élèvent pour mettre en garde la population contre les méfaits du vapotage sur le système respiratoire. Qu’en est-il au juste?

La première cigarette électronique a été commercialisée au milieu des années 2000, dans le but d’aider les personnes qui fument à se défaire de la cigarette. L’industrie du tabac vantait notamment la sécurité des produits de vapotage, insistant sur le fait qu’ils n’exposaient pas les consommateurs et les consommatrices aux substances nocives contenues dans les cigarettes de tabac.

Près de 20 ans plus tard, de nombreuses études démontrent les dangers que présente le vapotage. Il peut par exemple entrainer une dépendance à la nicotine chez les adultes autant que chez les jeunes. D’ailleurs, chez les adolescents, la dépendance est susceptible d’influencer le développement du cerveau et d’augmenter le stress de même que les symptômes d’anxiété et de dépression. Mais ce n’est pas tout. Le vapotage affecte également le système respiratoire.

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Les liquides de vapotage pointés du doigt 

Il est vrai que les produits de vapotage n’exposent pas la personne qui les utilise à toutes les substances nocives retrouvées dans le tabac. Ils sont pourtant loin d’être sécuritaires… En effet, les aérosols produits par les cigarettes électroniques contiennent plusieurs molécules potentiellement nocives pour la santé. Certaines sont aussi présentes dans la fumée de tabac, mais d’autres non.

L’une des difficultés de la recherche vient du fait que tous les liquides de vapotage ne contiennent pas les mêmes substances. Généralement, ils sont composés d’un mélange de propylène glycol et de glycérine végétale. La majorité contient également de la nicotine et/ou divers additifs aromatisants. Lorsqu’ils sont chauffés dans le dispositif de vapotage, les liquides s’évaporent et produisent des aérosols qui sont par la suite inhalés et introduits dans le système respiratoire.

Dans le cadre d’une étude toxicologique publiée en 2020, une équipe de recherche américaine a révélé que les aérosols produits lors du chauffage de liquides contenant seulement du propylène glycol et de la glycérine entrainaient une cytotoxicité (capacité à tuer les cellules) et une génotoxicité (capacité à modifier l’ADN) dans les cellules des voies aériennes supérieures (p. ex. bouche, nez, trachée). Selon les auteurs, l’ajout de nicotine et de saveurs aux liquides de vapotage rendrait les effets de ces aérosols sur le système respiratoire encore plus dommageables.

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Plus de problèmes respiratoires chez les personnes qui vapotent

Plusieurs études publiées depuis 2020 confirment les méfaits de la cigarette électronique sur le système respiratoire.

Une équipe de recherche canadienne a récemment démontré une association entre le vapotage et l’apparition de symptômes respiratoires chez les jeunes. En se basant sur les données du ITC Youth Tobacco and Vaping Survey de 2020 et de 2021, les chercheurs ont observé que les jeunes de 16 à 19 ans qui vapotaient étaient plus susceptibles de rapporter des symptômes comme de la toux, un essoufflement, des douleurs à la poitrine, des expectorations et une respiration sifflante que ceux qui ne vapotaient pas. Ces symptômes avaient également tendance à s’intensifier au fur et à mesure que la fréquence du vapotage augmentait, mais aussi possiblement avec l’utilisation de liquides de vapotage aromatisés ou de sels de nicotine.

Des chercheurs new-yorkais ont établi une association similaire dans une population d’adolescents et d’adultes en 2020. Leur étude, publiée dans le journal Nicotine & Tobacco Research, a en effet démontré que les personnes qui font usage de la cigarette électronique deux fois par jour ou plus sont davantage susceptibles de rapporter une respiration sifflante que celles qui ne vapotent pas. L’exposition à la fumée secondaire produite par le vapotage augmenterait également le risque, chez les jeunes adultes, de présenter le même type de symptômes.

La maladie pulmonaire associée au vapotage

Une mystérieuse maladie pulmonaire associée au vapotage (MPAV) est aujourd’hui reconnue et documentée dans la littérature scientifique. La MPAV se caractérise par des lésions pulmonaires liées à l’utilisation de produits de vapotage. Les symptômes peuvent inclure de la toux, un souffle court, des douleurs thoraciques, des nausées, des diarrhées et de la fièvre. Leur sévérité peut conduire à une hospitalisation et, dans certains cas plus graves, nécessiter une assistance ventilatoire ou même mener à la mort.

À l’heure actuelle, la cause de la MPAV demeure inconnue. Elle serait possiblement liée à la présence de cannabinoïdes comme le THC ou d’acétate de vitamine E dans certains produits de vapotage, quoique d’autres substances contenues dans les liquides de vapotage exempts de nicotine pourraient aussi être en cause.

Les personnes qui choisissent de vapoter devraient rester à l’affut et surveiller l’apparition des manifestations mentionnées plus haut. En présence de tels symptômes, il est conseillé de consulter rapidement un médecin.

Les méfaits de la cigarette électronique iraient cependant bien au-delà des poumons. Une étude parue dans le journal Respiratory Medicine a par exemple conclu que la nicotine contenue dans les liquides de vapotage engendrerait une élévation du rythme cardiaque et de la pression artérielle après sa consommation. Les effets de la cigarette électronique sur la santé cardiovasculaire sont toujours en cours d’étude.

Il est aussi important de noter qu’un usage inadéquat (p. ex. en modifiant le dispositif ou le liquide de vapotage ou en l’utilisant de manière non prévue par le fabricant) pourrait entrainer des répercussions néfastes sur la santé. Un mauvais usage d’un produit de vapotage pourrait notamment occasionner un changement de la température de chauffage du liquide et ainsi générer davantage de dérivés toxiques dans l’aérosol, ou encore provoquer des fuites de liquide, des brulures ou des explosions.

À l’heure actuelle, les données probantes demeurent toutefois insuffisantes pour évaluer les répercussions à long terme du vapotage sur la santé, spécialement en ce qui concerne les effets cardiovasculaires ou le potentiel cancérigène de la cigarette électronique. Les prochaines années devraient cependant apporter des précisions sur le sujet.

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La cigarette électronique pour soutenir la cessation tabagique : que sait-on aujourd’hui?

Certaines personnes qui désirent cesser de fumer se tournent aujourd’hui vers la cigarette électronique et d’autres dispositifs de vapotage pour les aider à écraser. Or, malgré les risques associés, le recours au vapotage pourrait aider certains individus qui entreprennent une démarche de cessation tabagique.

Une revue Cochrane mise à jour en 2024 rapporte en effet que la cigarette électronique avec nicotine augmenterait le taux de succès d’une cessation tabagique par rapport aux autres thérapies de remplacement de la nicotine (TRN). Néanmoins, notons que les études qui examinent l’efficacité des TRN se limitent le plus souvent à rapporter des effets et des résultats après 26 semaines d’usage, mais que celle de la cigarette électronique pour cesser de fumer pourrait changer dans le temps. Une récente étude comparant l’efficacité de la cigarette électronique avec de la nicotine et celle de la varénicline a montré un taux d’abstinence à la cigarette similaire entre les deux groupes à 26 semaines, mais plus élevé pour la varénicline à 52 semaines.

Considérant ces données, mais également les potentiels méfaits sur la santé associée au vapotage, le choix de se tourner vers la cigarette électronique devrait s’inscrire dans une démarche individuelle et réfléchie de cessation tabagique et soutenue par un professionnel de la santé.

Les risques que présentent les liquides de vapotage, qu’ils contiennent ou non de la nicotine ou des saveurs, semblent se concrétiser et même s’étendre au-delà de la santé respiratoire. Voit-on aujourd’hui seulement la pointe de l’iceberg? Une chose demeure certaine, le vapotage n’est pas sans danger.

Katia Vermette, réd. a.