Le double usage des cigarettes et des produits de vapotage double-t-il les méfaits?

Le double usage des cigarettes et des produits de vapotage double-t-il les méfaits?

On entend souvent parler de personnes qui fument ou de personnes qui vapotent, mais plus rarement de celles qui s’adonnent aux deux. Ce profil de consommation regroupe pourtant la majorité des utilisateurs de cigarettes électroniques au Canada.

Pourquoi assiste-t-on à une utilisation conjointe de cigarettes et de produits de vapotage? Trois grandes explications répondent à cette question : on transite d’un produit à un autre, on croit erronément à une réduction des méfaits, on agit sous le coup d’une dépendance parfois trop importante.

Le double usage des cigarettes et des produits de vapotage double-t-il les méfaits?

La transition de la cigarette électronique vers la cigarette traditionnelle est de plus en plus documentée. Une autre étude a aussi démontré que le risque de commencer à fumer chez les adolescents  qui vapotent était de quatre fois supérieur à celui couru par ceux qui ne vapotaient pas. Évidemment, il y a un moment dans ce changement comportemental où la personne qui vapotait commence également à fumer pour éventuellement délaisser le vapotage.

Il est donc important de continuer à informer les jeunes et les jeunes adultes que, d’une part, la cigarette électronique contenant de la nicotine induit une forte dépendance et que, d’autre part, le vapotage augmente le risque de commencer à fumer.

De façon générale, les gens pensent à tort que le vapotage est moins nocif que le tabagisme. Par conséquent, ils diminuent leur consommation de cigarettes pour compenser avec la vapoteuse. On observe cependant que la plupart des doubles utilisateurs ont tendance à continuer à fumer et à maintenir leur double consommation au fil du temps. « La plupart des adultes qui vapotent fument aussi la cigarette, et font donc ce que l’on appelle un “double usage”. Il est prouvé que ces personnes augmentent leur risque global d’être atteints de divers problèmes de santé », signale le Dr Andrew Pipe, grand expert de l’abandon tabagique au Canada.

Certaines personnes sont très dépendantes à la nicotine et se tournent vers le vapotage. Il est beaucoup plus facile de vapoter en société, dans les endroits publics ou à l’intérieur que de fumer. L’usage de la cigarette est aisément repérable, notamment par son odeur, mais la vapoteuse est beaucoup plus discrète. Les jeunes et moins jeunes peuvent alors l’utiliser sans attirer l’attention.

Méfaits du double usage

L’usage de la cigarette, à lui seul, est nocif. L’usage de la cigarette électronique, à lui seul, est nocif. Aussi le double usage de ces produits est-il encore plus nuisible à la santé.

Bien que le double usage semble s’accompagner d’une diminution des cigarettes consommées, les méfaits du tabagisme sont toujours présents. Étant donné que les cigarettes et les cigarettes électroniques ne contiennent pas les mêmes produits chimiques, il y a une plus grande exposition à des produits dangereux et cancérigènes lors de la double consommation que de la consommation unique de l’un de ces produits.

Or, nous ne connaissons pas les effets à long terme de la cigarette électronique, si bien que ceux du double usage et de la possible interaction entre ces deux produits deviennent, par le fait même, encore plus inquiétants.

« Les cigarettes électroniques et autres produits contenant de la nicotine ne devraient être présentés que comme des substituts du tabac et devraient s’accompagner de mises en garde indiquant qu’un double usage ne réduira pas sensiblement des dangers du tabagisme », précise le rapport de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac.

Le Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) est le principal établissement d’enseignement en santé mentale au Canada, et l’un des centres de recherche ayant agi comme pionnier dans ce domaine. Il a émis les recommandations suivantes aux professionnels de la santé pour ce qui est du double usage :

  1. Conseiller aux personnes qui fument et qui vapotent d’arrêter de fumer, pour vapoter uniquement.
  2. Conseiller aux personnes qui ont arrêté de fumer, mais qui vapotent actuellement de cesser de vapoter.
  3. Conseiller leurs patients sur les risques, notamment ceux associés à la rechute liée à la consommation de cigarettes classiques et au sevrage de la nicotine, ainsi que sur les bénéfices de renoncer à l’usage de la cigarette électronique.

Bien entendu, les personnes qui ne consomment aucun produit du tabac ou de vapotage ne devraient pas se mettre à le faire. Celles qui se servent du vapotage comme moyen de cessation tabagique devraient avoir recours à des thérapies de remplacement de la nicotine (TRN) approuvées par Santé Canada. Toujours selon le CAMH, dans une optique de réduction des méfaits, les personnes qui ne peuvent pas arrêter avec des TRN approuvées auraient avantage à se servir de la cigarette électronique comme moyen de cessation tabagique plutôt que de continuer à fumer. Elles diminueront ainsi leur exposition à plusieurs substances cancérigènes issues de la combustion du tabac commercial.

Le mieux consiste encore à entamer une démarche d’arrêt tabagique ou de produits de vapotage. Plusieurs ressources et programmes sont offerts à cette fin, soit les services J’ARRÊTE en ligne, fournis par téléphone et en personne par les spécialistes des Centres d’abandon du tabagisme, le SMAT, le Nico-Bar, Curieux d’arrêter, le Projet inspirant, et l’application destinée aux jeunes, Libair, qui, tous, soutiennent la cessation du vapotage .

Caroline Normandin, Ph. D.