Même « déguisé », le tabac demeure mortel

Bien que la cigarette et ses effets nocifs soient de mieux en mieux connus de par le monde, plusieurs mythes subsistent sur les autres manières de consommer « l’herbe à Nicot ». En effet, peu d’informations circulent sur l’usage de la pipe, du cigare ou de la shisha. Afin de pallier à la situation, la Journée mondiale sans tabac 2006, qui a pour thème « Le tabac : mortel sous toutes ses formes », lèvera le voile sur les risques qui leur sont associés.

« L’industrie du tabac continue à s’intéresser davantage au profit qu’à la vie humaine, à sa propre expansion qu’à la santé des générations futures, à son chiffre d’affaires qu’au développement durable des pays en difficulté », déplore l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui est l’instigatrice de cette journée célébrée tous les 31 mai.

Même si les pays se sont dotés d’une stratégie globale pour endiguer l’épidémie de tabagisme, les manigances des cigarettiers n’ont pas tellement changé. Ils continuent à rassurer les fumeurs préoccupés par leur santé en proposant de nouveaux produits – comme les cigarettes ou cigarillos à saveur de fruits vendus dans des emballages attrayants – qui offrent une illusion de sécurité, signale l’OMS. Or, il n’y a pas que la nature des produits qui peut porter à confusion. Les consommateurs sont toujours nombreux à opter pour des cigarettes aux appellations trompeuses, telles que les « douces », « légères » ou « à faible teneur en goudron ».

L’OMS espère qu’en faisant connaître les différentes formes de tabac, les gens comprendront mieux la nécessité d’implanter des réglementations strictes et de préconiser leur application. D’ici quelques semaines, le matériel promotionnel de la Journée mondiale sans tabac 2006 devrait être disponible à partir du site Internet de l’OMS (voir liens du numéro 62). L’an dernier, la Journée invitait les professionnels de la santé à s’impliquer davantage dans la lutte antitabac.

En 2005, un groupe de chercheurs de l’OMS s’est penché sur la consommation de tabac par le biais de pipe à l’eau, que l’on connaît également sous le nom de shisha. Leur rapport conclut que l’utilisation d’une pipe à l’eau, n’est pas une alternative sécuritaire à la cigarette. « Même après avoir passé au travers de l’eau, la fumée produite par la pipe à l’eau contient un niveau élevé de constituants toxiques, incluant le monoxyde de carbone, des métaux lourds et des produits chimiques pouvant causer le cancer. »

L’OMS ne recrute plus de fumeurs

Depuis le 1er décembre 2005, l’OMS n’embauche plus de fumeurs. La politique de l’agence, qui emploie plus de 8 000 personnes à l’échelle planétaire, a beaucoup fait parler d’elle. Plusieurs groupes antitabac l’ont d’ailleurs dénoncée.

Même si les employés fumeurs de l’OMS sont encouragés à cesser de fumer, la nouvelle règle ne s’applique pas au personnel en poste. Pour s’assurer du statut tabagique des futurs employés, deux questions leur seront dorénavant posées : « Fumez-vous ou consommez-vous des produits du tabac? » et si oui, « Comptez-vous continuer à le faire si vous êtes employé par l’OMS? » La candidature des personnes qui ne désirent pas rompre avec la nicotine sera écartée. Si quelqu’un ment, des mesures disciplinaires seront prises à son égard.

« Je désapprouve totalement la nouvelle décision de l’OMS de discriminer des êtres humains sur la base de leur comportement tabagique, affirme Gérard Dubois, président de l’Alliance contre le tabac de France. Cette politique n’a jamais été discutée et n’est pas incluse dans la Convention-cadre pour la lutte antitabac. » Selon lui, cette nouvelle a de quoi réjouir l’industrie du tabac qui accuse souvent la communauté de la santé d’être « contre les fumeurs ». À ce propos, on peut dire que le professeur Dubois a vu juste, car sur le forum de discussions du site Internet pro-tabac monchoix.ca, une soixantaine de messages dénonçaient cette politique « haineuse ».

En tant que chef de file mondial de la lutte antitabac, l’OMS estime qu’elle est chargée « de veiller à ce que cela se reflète dans toutes ses activités, y compris dans les pratiques en matière de recrutement ainsi que dans l’image projetée par l’Organisation et les membres de son personnel. »

Josée Hamelin