Un monde sans fumée à portée de main

Consacrée à la fumée secondaire pour une deuxième année consécutive, la Semaine québécoise pour un avenir sans tabac invitait la population à « faire un monde sans fumée », du 15 au 21 janvier. Plutôt que de mettre l’emphase sur les méfaits de la fumée secondaire, le Conseil québécois sur le tabac et la santé (CQTS) – qui organise l’événement – a opté pour une approche positive, axée sur les avantages de ne pas y être exposé.

« Depuis 10 ans, on voit une transformation importante de la norme sociale face à l’usage du tabac, a commenté le directeur du CQTS, Mario Bujold, lors du lancement de la campagne. De nos jours, faire un monde sans fumée n’est plus une utopie, et c’est ce que je nous souhaite de bâtir avec la Semaine québécoise pour un avenir sans tabac. »

Des environnements sans fumée

Les environnements sans fumée comportent une multitude d’avantages, indique la coordonnatrice de l’événement, Michelle Gosselin. « Ils permettent entre autres de sentir la subtilité des parfums qui nous entourent et de goûter pleinement aux plaisirs de la gastronomie, sans que nos sens ne soient altérés par l’odeur du tabac. » Faire un monde sans fumée permettrait aussi d’éviter que près de 400 non-fumeurs québécois ne meurent chaque année d’un cancer du poumon ou d’une maladie cardiaque causés par l’exposition à la fumée des autres.

Présent à la conférence de presse annonçant le début de la Semaine, le ministre de la Santé, Philippe Couillard, a rappelé que le tabagisme cause plus de 13 000 décès par année au Québec. « Chez nous, on meurt plus de cancers qu’ailleurs et ça, c’est grandement attribuable aux cancers du poumon, dont la plupart sont imputables au tabac, a-t-il précisé. En contribuant à la création d’un monde sans fumée, nous souhaitons améliorer le bilan de santé de la population et prévenir les maladies reliées à la cigarette et à sa fumée. »

Aide aux fumeurs

Même si la campagne 2006 ne portait pas sur l’arrêt tabagique, les fumeurs étaient invités à se renseigner sur les ressources de cessation mises à leur disposition. Le ministre Couillard les a encouragés à utiliser les services gouvernementaux gratuits : la ligne (1-866-527-7383), le site Internet J’arrête et les centres d’abandon du tabagisme. Il a également mentionné que le Défi J’arrête j’y gagne! est un des moyens les plus efficaces pour se libérer du tabac.

Porte-parole de la Semaine québécoise pour un avenir sans tabac pour une sixième année, la comédienne Mireille Deyglun en a fait la promotion sur plusieurs tribunes. Il faut dire qu’elle a la cause à cœur, le tabac lui ayant enlevé son père, son frère et deux de ses cousins. « Mon père fumait quatre paquets par jour, a-t-elle confié lors du lancement, et c’est moi qui lui allumait ses cigarettes sur son lit de mort ». Ayant fait usage du tabac pendant plusieurs années, Mme Deyglun avoue avoir fumé lorsqu’elle était enceinte de même qu’en présence de ses enfants. « À l’époque j’ignorais que la fumée secondaire était plus nocive que celle qui est inhalée par les fumeurs, raconte-t-elle. Si je l’avais su, j’aurais arrêté de fumer bien avant et je n’aurais pas exposé mes proches de la sorte. »

Activités de sensibilisation

Une quinzaine d’artistes du milieu télévisuel ont contribué au succès de la campagne en expliquant ce qui les motive à faire un monde sans fumée. Depuis quatre ans, plus d’une centaine de personnalités publiques se sont prêtées au jeu. Cette année, les spots de 30 secondes ont été réalisés par la cinéaste Léa Pool, qui a su leur insuffler une touche intimiste. Ces messages ont été diffusés du 8 au 22 janvier sur les ondes de Radio-Canada, RDI, TQS, TVA, LCN, Télé-Québec et CFCF.

Par ailleurs, une foule d’activités, allant de la distribution de matériel à la sensibilisation aux effets de la fumée secondaire, ont été organisées dans chacune des régions du Québec. Afin que chacun puisse s’y retrouver, une section du site Internet du Conseil québécois sur le tabac et la santé leur était dédiée.

Bien manger sans fumée

Cette année encore, le CQTS a pu compter sur l’appui de l’Association des restaurateurs du Québec (ARQ) dans le cadre de la journée Bien manger sans fumée, qui se tenait le 19 janvier. Près de 530 restaurants ont participé à cette activité, soit une centaine de moins qu’en 2005. Toutefois, Michelle Gosselin est quand même satisfaite du taux de participation. « Il est possible qu’un certain nombre d’établissements ayant déjà pris le virage sans fumée n’aient pas cru bon de s’inscrire, explique-t-elle. Néanmoins, comme ce fut le cas l’an dernier, plusieurs propriétaires ont profité de cette journée pour interdire définitivement l’usage du tabac dans leurs restaurants. »

« Avec la Loi sur le tabac qui va bientôt entrer en vigueur, c’est vraisemblablement la dernière fois que l’on participe à cette journée, lance François Meunier. Bien qu’il soit fier de collaborer à l’événement, le vice-président aux affaires publiques de l’ARQ a hâte que la cigarette soit bannie des restaurants. « La plupart de nos membres trouvent que les choses n’ont pas avancé assez vite, a-t-il admis. D’ailleurs, près de 25 % d’entre eux [environ 1000 restaurateurs] ont déjà opté pour des environnements sans fumée. »

La loi, un outil de prévention

« En renforçant la Loi sur le tabac, on s’est donné les moyens de mieux protéger la population dans les lieux publics, a rappelé le ministre Couillard. Comme société, on dispose d’un système de santé gratuit et accessible. Il faut faire en sorte qu’il soit toujours en place pour les générations futures. »

Questionné sur la manière dont il s’assurera du respect de la loi, M. Couillard a indiqué qu’une quarantaine d’inspecteurs ministériels et 70 en milieux de travail veilleront à son application. Il mise aussi sur le civisme des Québécois, fumeurs et non-fumeurs.

À ce propos, le ministre pourra compter sur l’appui du public, puisqu’un sondage Omnibus, réalisé dans le cadre de la Semaine révèle que la très grande majorité de la population est en faveur de la loi. À la question : « Êtes-vous d’accord pour qu’au Québec, il ne soit plus permis de fumer dans les restaurants, les bars et d’autres endroits publics? », 83 % des personnes interrogées ont répondu par l’affirmative. Seulement 8 % des répondants sont « totalement en désaccord » avec cette mesure. En 2005, 79 % des Québécois étaient en faveur d’une interdiction de fumer dans les lieux publics.

Un succès renouvelé

Bien qu’elle bénéficie de l’appui de près de 200 partenaires, la Semaine québécoise pour un avenir sans tabac n’a pour seul bailleur de fonds que le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Le coût total de la campagne se chiffre à 774 000 $, un investissement très rentable compte-tenu de la visibilité dont elle bénéficie.

Cette année encore, le CQTS peut dire « mission accomplie ». Un sondage de la firme Léger Marketing signale que 84 % des Québécois ont entendu parler de la Semaine québécoise pour un avenir sans tabac. Ses organisateurs connaissent la recette du succès puisqu’en 2005, l’événement bénéficiait déjà d’un taux de notoriété de 81 %. Maintenant que la barre est aussi haute, un des défis du CQTS consistera à faire encore mieux.

Semaine nationale

Ailleurs au Canada, la Semaine nationale sans fumée (qui est substituée au Québec par la campagne provinciale) se tenait, elle aussi, du 15 au 21 janvier. Initiative du Conseil canadien pour le contrôle du tabac, l’édition 2006 avait pour thème Travailler, vivre et jouer… encore mieux sans fumée. Comme à chaque année, le Mercredi sans tabac a atTiré l’attention des médias et du public sur les avantages de la cessation tabagique et les ressources communautaires accessibles aux personnes qui désirent arrêter de fumer.

Josée Hamelin