La ministre McLellan interpellée par des groupes antitabac

Le 22 janvier, la ministre de la Santé du Canada, Anne McLellan, a bien tenté de démontrer son intérêt à réduire le tabagisme en annonçant quelques investissements dans ce secteur, lors de sa visite à un centre communautaire d’Ottawa offrant un service de cessation.

La présence de la ministre constituait l’événement principal de la Semaine nationale sans fumée, le pendant canadien de la Semaine québécoise pour un avenir sans tabac. Cependant, la dizaine de journalistes sur place ont surtout prêté attention aux revendications de deux groupes antitabac très actifs sur la colline parlementaire, les Médecins pour un Canada sans fumée et l’Association pour les droits des non-fumeurs (ADNF), lesquels venaient tout juste d’émettre un communiqué doutant des capacités de Mme McLellan à promouvoir des mesures antitabac efficaces.

Les deux organismes ont dénoncé la lenteur du gouvernement à faire progresser l’interdiction des termes trompeurs des cigarettes, tels « douces  » et « légères », ou encore le retrait des étalages de produits du tabac chez les marchands. Le directeur de l’ADNF, Garfield Mahood, salue les efforts gouvernementaux consacrés aux services d’arrêt tabagique, mais il considère que d’éventuels règlements complémentaires à la Loi sur le tabac auraient encore plus d’impact sur la consommation. « Il est inadmissible que de telles mesures soient abandonnées en raison d’un remaniement de cabinet », dénonce-t-il, faisant allusion au fait que le vigoureux agenda antitabac d’Allan Rock n’ait pas trouvé preneur chez sa remplaçante. M. Rock s’était notamment distingué en imposant les mises en garde illustrées sur les paquets de cigarettes et en ayant annoncé l’intention du gouvernement de bannir les « légères ».

Le communiqué des deux groupes déplore aussi la récente et discrète coupe de 13 millions du budget fédéral antitabac de l’année en cours, qui serait passé de 71 à 58 millions. Le montant résiduel, de 58 millions, est bien inférieur à la moyenne annuelle attendue – 100 millions de dollars – de l’investissement de « plus de 500 millions sur cinq ans » annoncé en avril 2001 dans le sillage d’une hausse de taxes sur le tabac. Ce total quinquennal de 500 millions n’est toutefois pas abandonné, comme en fait foi le communiqué ministériel du 22 janvier.

Présente à la conférence de presse, la directrice de Médecins pour un Canada sans fumée, Cynthia Callard, a accordé plusieurs entrevues faisant quelque peu ombrage à Mme McLellan. « Un an après sa nomination, la ministre ne manifeste toujours pas de leadership dans le dossier du tabac », a-t-elle lancé. Citée par le Ottawa Citizen, Anne McLellan a expliqué que le dossier du tabac retenait réellement son attention, mais qu’elle ne pouvait imposer de nouvelles mesures de contrôle contre l’industrie avant de s’assurer que le gouvernement puisse les défendre éventuellement en Cour.

Bob et Martin

La sortie antitabac de la ministre fut accompagnée de plusieurs dévoilements. En plus de nouvelles données sur la prévalence, Santé Canada a annoncé l’attribution de subventions totalisant cinq millions. Une grande partie de cette manne est destinée à accroître la protection des non-fumeurs dans les provinces anglophones, en particulier en Ontario. Environ 14 % des subventions vont malgré tout à des organismes québécois, soit à Acti-Menu pour le Défi « J’arrête, j’y gagne! » et au Sport Étudiant de Québec pour le programme De Facto.

Santé Canada a aussi lancé une série d’annonces télévisées montrant des fumeurs « moyens » qui songent à écraser, Bob en anglais et Martin en français – interprétés par des comédiens. « Cette nouvelle campagne unique s’adresse aux fumeurs qui connaissent déjà les dangers de la cigarette et qui voudraient cesser de fumer, a précisé la ministre McLellan. Nous leur disons qu’il est peut-être difficile de cesser de fumer, mais qu’il est possible de le faire avec de l’aide disponible. » Il est prévu que ces messages télévisés évoluent en fonction des progrès de Bob et Martin vers l’interruption de leur néfaste habitude.

Mme McLellan espère que la population voudra appuyer ses efforts pour réduire le tabagisme. « J’encourage tous les Canadiens à célébrer la Semaine nationale sans fumée en prenant des mesures pour que le Canada devienne une société entièrement sans fumée », a-t-elle déclaré.

Denis Côté