Des prix Oxygène et Cendrier seront décernés pour dénoncer les scènes de tabagisme inutiles

À la fin de novembre, le comédien Jici Lauzon et le Conseil québécois sur le tabac et la santé (CQTS) ont demandé au public de proposer des films pour la remise au printemps prochain des premiers prix Oxygène et Cendrier. Ces prix contre la promotion du tabagisme à l’écran ont pour but de sensibiliser les producteurs et les artisans du cinéma de fiction aux conséquences sociales utiles ou néfastes de certains de leurs choix.

À force de voir des films où les vedettes fument, les adolescents en viennent à surestimer la popularité réelle du tabac dans la population et accroissent leur risque de commencer à fumer, affirme Jici Lauzon, et il n’est pas le seul. Une étude parue en juin 2003 dans la revue médicale britannique The Lancet a déjà estimé que ce risque de basculement dans la dépendance au tabac pouvait être triplé.

Les images où on voit des personnages fumer procurent au tabac une vitrine. « Alors que le taux de tabagisme a chuté de moitié depuis 20 ans, entre 1999 et 2006, la cigarette était présente dans 75% des films destinés aux adolescents », déplorent Jici Lauzon et le CQTS, qui jugent que le tabagisme est trop souvent représenté sous un jour fascinant, notamment comme un accessoire de la puissance, du charisme ou de l’esprit rebelle d’un personnage. À l’inverse, la mauvaise haleine, les dents et les doigts jaunis, et surtout les problèmes de santé, ne font jamais partie du portrait. Le réalisme s’arrête là.

Mises en nomination et sélection

En allant sur le site Web filmSANSfiltre.ca, on peut trouver quantité de renseignements sur le phénomène du tabagisme à l’écran, et mettre en nomination un film québécois et un film étranger qui se démarquent par leur usage responsable (Oxygène) ou au contraire leur usage exagéré (Cendrier) du tabac. Les cinéphiles qui auront participé au processus de nomination entre le 1er décembre et le 31 janvier seront éligibles au tirage des récompenses.

Un jury composé d’artisans du cinéma, d’experts, de critiques de films et d’étudiants du milieu cinématographique évaluera les trois productions finalistes dans les deux catégories. Les prix Oxygène et Cendrier seront décernés en mars.

Et les jeux vidéo?

Pour le moment, aucune recherche scientifique n’a porté sur les effets de l’exposition aux scènes de tabagisme sur les écrans des jeux vidéo, ou dans les vidéoclips de chansons. De telles scènes existent néanmoins et il est raisonnable de leur supposer un effet similaire à celui des scènes de films. Le projet de sensibilisation du CQTS prévoit donc des rencontres dans le courant de l’année 2010 avec des créateurs, notamment de l’industrie du jeu vidéo, laquelle est très présente au Québec.

Aux États-Unis, devant la profusion anormale de scènes de tabagisme dans les fictions, le groupe Smoke Free Movies réclame quatre signes de bonne volonté aux producteurs et artisans du cinéma : afficher une cote R sur les annonces d’un film pour signaler qu’on y fume, projeter ou faire défiler avant le film une courte annonce (efficace) contre le tabagisme, déclarer dans le générique final que ses producteurs et artisans n’ont pas reçu d’argent de l’industrie du tabac (si c’est le cas), et rendre les marques de cigarettes impossibles à identifier parmi les images des films.
Au Québec, Jici Lauzon croit qu’une campagne de conscientisation sera mieux accueillie qu’une approche réglementaire.

Johannie Deschambault et Gabriel Legault-Laurier