50 % moins de fumeurs chez les jeunes autochtones

Le vent serait-il en train de changer dans les réserves autochtones du Canada? Bien que plus de la moitié des gens y fument encore, beaucoup moins d’adolescents se laissent piéger par la dépendance à la nicotine. C’est ce que constate l’Enquête régionale sur la santé des Premières Nations (en anglais seulement) publiée récemment par le Centre de gouvernance de l’information des Premières Nations (CGIPN).

Cette enquête, menée en 2015-2016, est la troisième du CGIPN. Financée par Santé Canada et réalisée par des autochtones, celle-ci a questionné quelque 24 000 personnes vivant dans plus de 250 réserves ou communautés nordiques. En ce qui concerne le tabagisme, le CGPIN considère seulement l’usage non traditionnel du tabac. Ses données montrent que la prévalence du tabagisme parmi les adultes est restée relativement stable de 2008-2010 à 2015-2016, passant de 57 % à 54 %.

Si le taux de tabagisme est resté relativement stable
chez les adultes depuis 2008,
il a chuté de presque 50 % chez les 12 à 17 ans,
passant de 33 % à 17 %.

50 % moins de fumeurs chez les jeunes

La bonne nouvelle, c’est que le pourcentage de jeunes de 12 à 17 ans qui fument actuellement a chuté de presque 50 % depuis 2008, passant de 33 % à 17 %. On remarque une tendance similaire chez les jeunes non-autochtones du Québec : la proportion d’entre eux qui ont fumé une cigarette au cours des 30 derniers jours a également diminué d’environ 50 % depuis 2008, passant de 15 % à 6 % (ces chiffres grimpent toutefois à 22 % et 12 % si l’on considère l’ensemble des produits du tabac). Le portrait du CGPIN est également réjouissant en ce qui concerne les femmes enceintes. La proportion de celles qui n’ont pas fumé pendant leur grossesse a grimpé de 53 % à 62 % entre 2008-2010 et 2015-2016.

« Il est possible que les normes sociales sur le tabac aient changé dans ces communautés de la même façon qu’ailleurs, analyse Flory Doucas, codirectrice et porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. Plusieurs d’entre elles appliquent les mesures sur le contrôle du tabagisme en vigueur dans leur province, comme la prohibition des étalages ou l’interdiction de fumer dans certains endroits publics. Cela n’empêche pas qu’on devra encore en faire plus pour réduire la prévalence tabagique de ces communautés, comme partout au pays. »

Sociologie du tabagisme chez les Inuits adultes

Le taux de tabagisme des Inuits adultes est absolument renversant : selon les données les plus récentes, 75 % d’entre eux fumaient en 2012. Santé Canada s’est penché sur les déterminants sociaux associés à cet usage, en s’arrêtant plus spécifiquement sur les réalités du Grand Nord, incluant les maisons surpeuplées, l’insécurité alimentaire et l’héritage des pensionnats autochtones.

L’enquête, menée auprès d’environ 2600 Inuits adultes, montre que vivre dans une habitation surpeuplée – c’est-à-dire comptant plus d’un habitant par pièce – augmente le risque d’être fumeur. Le stress ou une exposition à un plus grand nombre de fumeurs pourrait être en jeu. Les données montrent aussi que les femmes bénéficiant d’une sécurité alimentaire sont 40 % moins susceptibles d’être fumeuses que celles qui peinent à se nourrir. À l’inverse, les femmes ayant séjourné dans un pensionnat autochtone sont 2,4 fois plus susceptibles de fumer que celles qui ont échappé à ce traumatisme. Ce dernier résultat souligne « l’importance de considérer cet aspect de l’histoire [canadienne] pour tenter d’expliquer l’usage du tabac », estiment les chercheurs.

Anick Labelle