La Colombie-Britannique suit l’exemple américain

Le gouvernement néo-démocrate de Colombie-Britannique menace d’intenter une poursuite civile contre l’industrie du tabac – et se donne les moyens législatifs de le faire.

En effet, avant même l’annonce d’une entente de principe à Washington, le premier ministre Glen Clark et sa ministre de la santé, Joy MacPhail, ont lancé le 16 juin une nouvelle offensive contre le tabagisme qui reprend plusieurs éléments de ce qui se fait depuis quelque temps aux USA.

Mme MacPhail a écrit aux principaux fabricants canadiens pour exiger qu’ils transforment radicalement leurs stratégies de mise en marché en cessant toute activité de marketing qui cible les jeunes et en finançant des campagnes de sensibilisation pour prévenir l’usage du tabac chez les mineurs.

Elle a aussi demandé aux cigarettiers de lever le voile sur leurs recherches internes au sujet des risques de santé associés au tabac ou à la manipulation des taux de nicotine.

La troisième demande de Mme MacPhail : l’industrie doit dédommager la province pour les dépenses de santé reliées au tabagisme, évaluées à 500 millions $ par année. Toutes proportions gardées, ce montant est de trois à quatre fois plus important que la compensation envisagée par l’entente « globale » américaine, car les États américains n’ont pas de régime public universel d’assurance-maladie.

Si l’industrie refuse de négocier avec le gouvernement provincial, celui-ci compte adopter une loi pour faciliter les recours collectifs contre les cigarettiers. Un projet de loi a déjà été déposé; il permet de présenter des preuves d’ordre statistique dans les poursuites à l’endroit de l’industrie du tabac. De plus, les plaignants n’auront plus à prouver la nocivité d’une marque particulière de cigarettes; une preuve générale sur le caractère toxique des cigarettes suffira.

Le 3 juillet, la société Rothmans, Benson & Hedges a répondu aux exigences de Mme MacPhail par le biais d’une lettre ouverte invitant le gouvernement à augmenter les taxes sur le tabac s’il veut absolument tirer plus de revenus des fumeurs. Le président de Rothmans, Joe Heffernan, a menacé de contester la constitutionnalité du projet de loi déposé par Mme MacPhail. Selon un porte-parole de la société, le projet de loi serait une entorse au common law en ce qu’il dégage d’éventuels plaignants d’une partie du fardeau normal de la preuve.

Ces escarmouches juridiques n’empêcheront pas la Colombie-Britannique d’aller de l’avant avec une autre partie de sa stratégie antitabac, une nouvelle campagne de sensibilisation qui reprend les publicités-choc du Massachussetts. Le budget provincial de prévention passe de 2 millions à 5 millions $ par année, et augmentera l’année prochaine à un minimum de 10 millions $.

Rob Parker, le président du Conseil canadien des fabricants de produits du tabac, a bien sûr dénoncé les nouvelles mesures, qui seraient à son avis motivées par des raisons d’ordre purement fiscales.

Par contre, le nouveau ministre fédéral de la Santé, Allan Rock, a confirmé que son gouvernement réfléchissait encore à la possibilité d’une poursuite civile contre l’industrie et a invité les 10 provinces à élaborer une stratégie commune lors d’une rencontre de ministres de la santé au mois de septembre.

Francis Thompson