La nomination d’Allan Rock : un atout pour la santé publique

Le soir du 2 juin dernier, lorsqu’on a appris la défaite électorale de M. David Dingwall, l’artisan principal de la loi C-71, plusieurs militants antitabac avaient la mine plutôt basse. À qui choisirait-on de confier le poste névralgique de ministre fédéral de la Santé à ce moment important, alors qu’on attend encore le dépôt de nouveaux règlements? Le nouveau ministre serait-il aussi convaincu et dynamique que son prédécesseur?

Quelques jours plus tard, le choix de M. Allan Rock pour poursuivre le travail de M. Dingwall a suscité de l’enthousiasme chez les organismes de santé, surtout au Québec où l’on se réjouit d’avoir un ministre fédéral qui se débrouille bien en français.

Nous avons demandé à Heidi Rathjen, directrice de campagne pour la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, de nous présenter ce ministre, avec lequel elle a eu à collaborer étroitement en tant qu’ancienne directrice et vice-présidente de la Coalition pour le contrôle des armes.

Lorsqu’il fut élu pour la première fois en 1993, Allan Rock possédait déjà les qualités et la réputation nécessaires pour être nommé au ministère de la Justice, un poste à haute visibilité aux dossiers souvent fort délicats. Au cours d’un seul mandat, il a réussi à faire adopter des lois sur de nombreuses questions difficiles, souvent hautement controversées, dont la plus importante fut le contrôle des armes.

Ayant moi-même milité pendant six ans pour un meilleur contrôle des armes, et ayant eu affaire avec trois ministres de la Justice différents de même qu’à d’innombrables autres élus, je suis dans une position plutôt privilégiée pour fournir des références à notre nouveau ministre de la Santé.

On me taxera peut-être de manquer d’objectivité, mais je n’ai que de bonnes choses à dire à son sujet. De tous les ministres, députés, sénateurs et conseillers municipaux que j’ai rencontrés, M. Rock se distingue par sa sincérité, son honnêteté et son dévouement pour l’intérêt public.

Dans le dossier des armes à feu, comme l’a si bien dit Sarah Saber, dont le mari a été abattu à l’Université Concordia en 1992, M. Rock à choisi la voie de la justice plutôt que celle de la facilité. Il a mis sa réputation et sa crédibilité en jeu pour en arriver à une loi rigoureuse. Il a tenu bon face à la combativité de nombreux propriétaires d’armes à feu, à l’opposition de beaucoup de ses collègues, et aux critiques sans merci de la part des médias de l’Ouest. Il a résisté à l’immense lobby des armes et n’a jamais hésité à dénoncer leurs tactiques de désinformation.

Tout ça de son propre gré, afin de faire progresser la sécurité de la population et non sa propre carrière.

M. Rock n’est pas un homme qui a peur de l’affrontement. En septembre 1994, par exemple, alors que des dizaines de milliers de manifestants étaient venus sur la Colline parlementaire clamer leur opposition au contrôle des armes à feu, M. Rock aurait fort bien pu s’éclipser. Il a plutôt choisi de venir dire clairement à la foule en colère qu’il n’avait aucunement l’intention de reculer.

En même temps, c’est un homme à l’écoute de la population. Avant de prendre une décision définitive sur l’enregistrement obligatoire des armes légales, M. Rock a passé plusieurs mois à consulter les propriétaires d’armes à feu à travers le pays – et ne s’est pas laissé déranger par les manifestations qui l’accueillaient un peu partout. Il a fait preuve de ce même esprit d’ouverture envers les familles de victimes d’armes à feu, prenant le temps de les rencontrer et d’écouter leur point de vue même s’ils sont loin d’être des experts dans l’aspect juridique du contrôle des armes.

Il faudra probablement attendre quelque temps avant que M. Rock ne se prononce sur la lutte anti-tabac, car il a l’habitude de bien faire ses devoirs avant d’émettre une opinion. Ensuite, par contre, il n’est jamais dépourvu de réponses, même face aux questions les plus difficiles de ses adversaires politiques – une qualité essentielle pour celui qui aura la responsabilité de faire adopter des règlements en vertu de la loi C-71!

Bien que je ne connaisse pas sa position sur le tabagisme, je peux cependant déduire de son passé que nous débutons ce nouveau mandat électoral avec une bonne longueur d’avance.

Heidi Rathjen