Quand 16 277 personnes décident d’en finir avec le tabac

Le ministre de la Santé lui-même, le Dr Yves Bolduc, est venu à la cérémonie de clôture commune du 5e Défi Santé 5/30 et du 10e Défi « J’arrête, j’y gagne! », à Montréal le 8 mai. Cinq portions de fruits et légumes par jour; 30 minutes d’exercice quotidien, au moins cinq jours par semaine; et ne pas fumer : c’est ce que prêche et pratique Yves Bolduc, comme l’a découvert le jovial maître de cérémonie Francis Reddy.

Parmi les 16 277 Québécois inscrits en 2009 au Défi « J’arrête, j’y gagne! » à l’appel du comédien Jici Lauzon et de l’organisme Acti-menu, les deux tiers ont effectivement cessé de fumer entre le 1er mars et le 11 avril, sinon depuis le 1er mars jusqu’à présent.

Des retombées au quotidien

L’an prochain, si le comportement observé ces dernières années se répète, il pourrait rester entre 21 et 29 % des volontaires de cette année qui n’auront toujours pas refumé. Pour ces ex-fumeurs et surtout ex-fumeuses, le renoncement au tabac se sera déjà traduit, entre autres, en rajeunissement du corps, en capacité respiratoire accrue, en meilleure résistance aux infections, en économies sur le budget ou en soucis de moins à se faire concernant la santé d’un entourage qui, souvent, respirait malgré lui des émanations toxiques.

Chez les fumeurs et fumeuses inscrits au Défi qui ont rechuté dans leur dépendance avant la fin des six semaines, la tentative de cette année pourrait bien, tout de même, être la dernière avant LA bonne. En cela, la fin prochaine de leur tabagisme fera penser à celle de la gagnante du Défi « J’arrête, j’y gagne! » de 2009, Cécile Mercier, une massothérapeute de l’Outa­ouais, dans la jeune quarantaine, qui en était à son troisième essai dans le cadre du Défi, selon ce qu’elle a dit à Info-tabac.

Quand la première cigarette de la journée est servie avant le jus d’orange matinal ou précède la douche ou rend excitante la promenade du chien; ou quand un passage dans un dépanneur fait acheter un paquet presque machinalement, un fumeur ou une fumeuse doit d’abord connaître en détail ses habitudes à changer, pour réussir à ne plus fumer.

Outre la douce moitié, la famille ou d’autres proches, certaines organisations ne demandent pas mieux que d’encourager l’arrêt tabagique, en offrant aux volontaires une oreille, des conseils, des produits utiles et même des récompenses. À travers le 10e Défi « J’arrête, j’y gagne! », ce furent Acti-menu et l’Institut de cardiologie de Montréal, les stratèges nationaux et spécialistes locaux de la santé publique au gouvernement du Québec, la Société canadienne du cancer, les pharmacies Jean Coutu, des fabricants de produits de désaccoutumance au tabac comme Pfizer et Novartis, et des entreprises comme Nolitours et le Groupe BMR.

Des fumeurs doutant de leurs forces?

Il y a trois décennies, la première cigarette fumée par Cécile Mercier ne lui avait pas laissé un bon souvenir. Au contraire.

Des millions de fumeurs se sont étouffés avec la fumée de leur première cigarette : cela a pourtant servi de prologue à plusieurs années de dépendance, et un tel enchaînement motive les promoteurs de la santé à chercher à prévenir le tabagisme.

Heureusement, il y a aussi des drogués du tabac qui veulent écrire des chapitres additionnels et plus respirables à leur vie, et qui y parviennent. Comme madame Mercier, ou Claudia Lafrenière de la Côte-Nord, ou Valérie Boisvenu et Isabelle Baillargeon des Laurentides, toutes vainqueures du Défi en 2009; ou comme le comédien Jici Lauzon, qui a cessé de fumer quelques années plus tôt.

Alors, pourquoi les inscriptions au Défi « J’arrête, j’y gagne! » ont-elles glissé graduellement de 37 900 volontaires en 2004 à 16 277 en 2009? Le nombre de fumeurs au Québec est quand même loin d’avoir fondu de moitié durant les mêmes cinq ans.

En mai, la directrice de la recherche et du développement de contenu santé chez Acti-menu, Danièle Prévost, ne connaissait pas encore la clef du mystère. L’équipe d’Acti-menu analyse toutefois minutieusement la situation et n’a pas dit son dernier mot.

En Ontario, on observe la même tendance préoccupante : le défi Mettre un frein à la cigarette, tenu lui aussi cet hiver, a recruté 22 365 personnes s’engageant à arrêter de fumer, contre 26 632 en 2008, et davantage lors des années précédentes.

Une affaire à suivre.

Pierre Croteau