L’ordonnance collective pour cesser de fumer, « le meilleur des deux mondes »

Acheter de la gomme ou un timbre de nicotine pour cesser de fumer, c’est bien. Se faire rembourser ces médicaments avec l’ordonnance d’un médecin, c’est mieux. Bénéficier d’un remboursement et d’un suivi sans visite médicale, c’est le summum!

Le 1er septembre dernier, la Direction de santé publique (DSP) de Montréal a émis une ordonnance collective permettant aux pharmaciens d’initier une thérapie de remplacement de la nicotine. Un seul médecin, le Directeur de la DSP Richard Lessard, autorise tous les pharmaciens du Québec à dispenser trois thérapies aux fumeurs référés par un Centre d’abandon du tabagisme (CAT) de l’Île de Montréal : le timbre de nicotine, la gomme de nicotine ou une combinaison des deux.

Les fumeurs sont ensuite remboursés par l’assurance médicaments du Québec ou leur assureur privé, comme s’ils avaient obtenu une ordonnance individuelle. « Nous étions à la recherche d’une solution simple qui puisse nous permettre de prescrire, avec les CAT, parce qu’on sait que l’utilisation de médicaments peut doubler les taux de cessation du tabagisme, commente Diane Villeneuve, médecin-conseil à la DSP. Et quand les médicaments sont remboursés, ça augmente encore l’efficacité de la thérapie. D’autant plus que les CAT et les pharmaciens effectuent un suivi. »

Cette ordonnance collective, appuyée par le Collège des médecins et l’Ordre des pharmaciens, suit un protocole de l’Institut de cardiologie de Montréal (ce partenaire de la DSP pour des projets de recherche avait expérimenté l’ordonnance collective à l’interne).

Il existe un précédent : la DSP de l’Abitibi-Témiscamingue a signé en janvier 2006 une ordonnance collective pour le remplacement de la nicotine, en collaboration avec les dix CAT et les pharmaciens de la région (et seulement dans la région; l’ordonnance collective de la DSP de Montréal, pour sa part, peut être exécutée par un pharmacien ailleurs au Québec, du moment que le fumeur est référé par un CAT montréalais). Il n’existe pas de statistiques sur le nombre de thérapies de remplacement de la nicotine initiées par les pharmaciens abitibiens depuis 2006.

L’ordonnance collective, peu connue du grand public, est facilitée par une loi qui modifie le Code des professions adoptée par Québec en 2002. Cette législation élargit les champs de pratique de certains professionnels de la santé.

Les CAT, pour leur part, ont été mis en place en 2003 dans chaque Centre de santé et de services sociaux et dans certains hôpitaux.

En principe, l’Ordre des pharmaciens n’est pas favorable à l’ordonnance collective s’appliquant à des médicaments en vente libre, mais il a été séduit par la formule à laquelle ses membres participent conjointement avec les CAT. « Cesser de fumer avec des gommes ou des timbres de nicotine, c’est une initiative qui a un certain succès », explique Pierre Ducharme, adjoint professionnel au secrétaire général de l’Ordre. « Cesser de fumer avec un appui psychologique ou moral, c’est aussi une stratégie qui a un certain succès, poursuit-il. Quand les deux mesures sont mises en place, la médication et le support d’un intervenant d’un CAT, c’est le meilleur des deux mondes. »

Au moment d’écrire ces lignes, il n’existait pas de données permettant d’évaluer l’impact de l’initiative.

L’Ordre des pharmaciens souhaite que dans une deuxième phase, l’ordonnance collective fonctionne en sens inverse : qu’un pharmacien amorce une thérapie de remplacement de la nicotine puis réfère le fumeur à un CAT. La DSP n’est pas convaincue. « Le soutien, individuel ou en groupe, augmente les taux de cessation, rappelle Diane Villeneuve. C’est important que le fumeur soit d’abord référé par un CAT. »

Jean-Sébastien Marsan