Gatineau et Ontario sans fumée
Juin 2003 - No 45
Selon un sondage SOM commandité par Radio-Canada et le quotidien Le Droit, 69 % des résidants de Gatineau approuveraient une interdiction totale de fumer dans les lieux publics intérieurs, tels les restaurants et les bars, comme celle en vigueur avec succès à Ottawa depuis le 1er août 2001.
Rappelons que Gatineau est cette nouvelle grande ville de 230 000 habitants née en janvier 2002 de la fusion de cinq municipalités québécoises, dont Hull, situées face à Ottawa de l’autre côté de la rivière des Outaouais. Cet appui impressionnant dépasse même celui obtenu lors des sondages à Ottawa, avant ou peu après sa transformation en ville sans fumée, lequel appui variait de 55 à 65 %.
Bien qu’il ne souhaite pas voir sa municipalité s’engager dans la protection des non-fumeurs, le maire de Gatineau, Yves Ducharme, n’est pas étonné du support des citoyens. « Je ne suis pas surpris parce que je crois que ça correspond au nombre grandissant de non-fumeurs dans la société, a-t-il déclaré au Droit fin avril. Mais ce n’est pas notre juridiction. Le gouvernement du Québec doit prendre ses responsabilités et y mettre l’argent nécessaire. Il doit éviter de transférer, une fois de plus, des responsabilités aux municipalités sans leur donner les moyens de les assumer. Un tel règlement coûte cher car il faut pouvoir l’appliquer et il sera contesté en cour, c’est certain. » Le maire Ducharme croit qu’un sondage effectué à la grandeur du Québec donnerait une meilleure idée de l’opinion de l’ensemble des Québécois, ce qui aurait plus d’influence sur le nouveau gouvernement libéral.
Bien avant la tenue d’un éventuel sondage panquébécois, les citoyens de Gatineau ont encore été interrogés sur leur appui à un règlement antitabac sévère, cette fois par des chercheurs de l’Université du Québec en Outaouais. Les résultats de ce sondage seront dévoilés en juin par ses promoteurs, la Commission Gatineau Ville en santé et la Direction de la santé publique de l’Outaouais.
Les citoyens de Gatineau ont sans doute eu l’occasion d’apprécier l’air assaini des restaurants de la capitale. Ils ont aussi pu constater que l’ensemble des restaurants d’Ottawa, de même que la plupart des bars de qualité, font toujours de bonnes affaires.
L’Ontario bientôt sans tabac
Il est probable que, à court ou moyen terme, la province de l’Ontario bannisse le tabac dans l’ensemble de ses bars et restaurants, si on se fie aux propos de l’actuel ministre de la santé, Tony Clement, et surtout au nouveau programme de l’opposition officielle, le Parti libéral.
En réaction à une sortie fort médiatisée de l’Association médicale de l’Ontario (AMO) en février, réclamant l’interdiction de fumer dans tous les lieux publics intérieurs, le ministre Clement a déclaré que cette proposition méritait une haute considération. Tout en signalant que 70 % de la population ontarienne profitait déjà de règlements municipaux en la matière, il a révélé avoir demandé une révision complète de la stratégie provinciale antitabac. Ce plan inclurait notamment de nouvelles taxes sur le tabac. « Jusqu’à 2 600 personnes décèdent chaque année en Ontario à cause de la fumée secondaire. Ces décès sont évitables à 100 % », avait pour sa part fait valoir le président de l’AMO, le Dr Elliot Halparin.
Encore plus prometteuse que les propos du ministre Clement, la plate-forme électorale du Parti libéral de l’Ontario contient un solide programme antitabac. Au terme de huit années de régime conservateur, les libéraux sont favoris dans les sondages, en vue des élections provinciales attendues pour l’automne prochain. Fin mars, le Parti libéral a dévoilé son programme en matière de santé, un cahier de 24 pages intitulé The health care we need, dont une section était consacrée à la stratégie contre le tabagisme.
Ambitieux, le programme antitabac des libéraux ontariens est formé de six points très clairs :
- hausses de taxation (pour éloigner les enfants du tabac);
- interdiction des étalages du tabac dans les points de vente;
- interdiction de fumer dans tous les endroits publics intérieurs dans un délai de trois ans;
- subvention des aides pharmacologiques à l’arrêt tabagique;
- campagnes antitabac créées par des jeunes;
- aide pour abandonner la culture du tabac.
Denis Côté