Nouvelles brèves

Pierre Bourgault n’est plus

Environ le quart des décès québécois actuels étant attribuables au tabagisme des dernières décennies, Info-tabac ne cherche pas à rapporter les nombreuses mortalités liées au tabac de nos célébrités, des milieux artistiques, politiques ou autres. Mais on ne peut passer sous silence le cas du chroniqueur Pierre Bourgault, emporté le 16 juin par une maladie pulmonaire obstructive chronique, à l’âge de 69 ans. Fait remarquable, presque tous les médias québécois n’ont pas hésité à clairement associer le décès du célèbre polémiste à sa consommation acharnée de tabac. La plupart des quotidiens ont publié une photo de M. Bourgault à la une, avec sa cigarette, et lui ont consacré une caricature sur ce thème. Dans La Presse, Serge Chapleau a illustré un Bourgault qui dit « C’est c’qu’on va voir! » en apercevant une affiche d’interdiction de fumer à l’entrée du paradis.

Communicateur hors pair, le pionnier indépendantiste avait plusieurs fois, dans sa chronique du Journal de Montréal, dénoncé des mesures antitabac tout en qualifiant de « tabacons » les défenseurs de cette cause. Pierre Bourgault se fit surtout connaître à titre de président du Rassemblement pour l’indépendance nationale de 1964 à 1968, parti politique qui se saborda pour laisser place au nouveau Parti québécois de René Lévesque.

Grand Prix sans tabac

À la lumière d’un article de Martin Leclerc, journaliste sportif au Journal de Montréal, le Grand Prix de Formule 1 pourra être couru à Montréal sans aucune publicité de cigarettes entre 2004 et 2006, comme c’est le cas en France et en Grande-Bretagne. Au Canada, les commandites du tabac seront complètement interdites dès le 1er octobre prochain. « Le contrat qui nous lie à Bernie Ecclestone est valide jusqu’en 2006. Nous avons donc trois années devant nous. Qu’adviendra-t-il en 2007 si les commandites du tabac existent encore en F1? Je n’en ai aucune idée », a déclaré le promoteur Normand Legault. Ainsi, la présentation de l’épreuve canadienne serait à l’abri des foudres du tsar de la Formule 1, le milliardaire Bernie Ecclestone, qui prend la défense des commandites du tabac, allant même jusqu’à retirer les épreuves de certains pays récalcitrants.

De son côté, le 25 juin, le Conseil mondial de la Fédération internationale de l’automobile (FIA) est revenu sur sa décision d’interdire la publicité des marques de cigarettes à compter d’octobre 2006. Suite à un avis juridique, le Conseil a transformé le bannissement formel en simple recommandation. Ce recul est dû à des menaces de poursuites de la part d’écuries liées à l’industrie, et à la grogne du président de la FIA, Max Mosley. Ce dernier n’a pas apprécié que l’Union européenne interdise les commandites du tabac dès juillet 2005, 15 mois avant l’engagement de sa fédération. La bataille continue donc à l’échelle internationale entre ministres de la santé et écuries de Formule 1, devenues les plus efficaces commandites du tabac au monde.

Le Canada signe

Le 15 juillet à New York, au siège des Nations Unies, la ministre de la Santé, Anne McLellan, a signé la Convention-cadre antitabac de l’Organisation mondiale de la santé, au nom du gouvernement canadien. En paraphant ce premier traité mondial de santé publique, le Canada rejoint ainsi la quarantaine de pays qui se sont engagés à respecter la série de mesures antitabac stipulées. En vigueur 90 jours après sa 40e ratification, la Convention sera donc effective dès cet automne. Rappelons que le Canada a joué un rôle important dans l’élaboration de ce traité, apportant un support financier et technique.

En marge de l’engagement de notre pays, une coalition de six organismes, dont l’Association canadienne de santé publique (ACSP), a réclamé du gouvernement qu’il appuie davantage la lutte contre le tabagisme dans les pays pauvres. « Le tabac est, avec le sida, la cause de mortalité qui s’accroît le plus vite au monde, a déclaré le directeur de l’ACSP, Gerry Dafoe. À moins que des mesures efficaces ne soient mises en place pour réduire le tabagisme, le nombre de décès annuels liés au tabac doublera d’ici 2020, passant de 5 à 10 millions. » Les organismes demandent qu’Ottawa consacre dans les pays pauvres autant contre le tabac que contre le sida, soit 80 millions $ par année, au lieu de moins d’un million comme c’est actuellement le cas.

Trois capitales sans fumée

Grâce à des arrêtés municipaux, les villes d’Edmonton (Alberta), de Fredericton (Nouveau-Brunswick) et de Winnipeg (Manitoba), toutes trois capitales de leur province, sont devenues sans fumée au 1er juillet. Alors qu’à Fredericton et Winnipeg, ce sont tous les lieux publics intérieurs (tels les bars, les restaurants et les centres commerciaux) qui profitent dorénavant d’une qualité d’air améliorée, le règlement se fait plus hésitant du côté d’Edmonton. Même si cela leur est désormais interdit dans les restaurants, les fumeurs peuvent continuer de « boucaner » dans les bars, casinos et salles de bingo jusqu’en juillet 2005.

Près de nous, au Nouveau-Brunswick, la discussion est vive autour du projet de la région de Moncton d’imiter Fredericton. Allan C. Mcgathey, président des Établissements licenciés de la province, indique que la clientèle semblerait déjà revenue à la normale dans les bars de la capitale et aurait même augmenté dans les restaurants. Il souhaite que la province établisse un règlement uniforme, une idée qui n’emballe pas le ministre de la Santé, Elvy Robichaud. « Cela fait partie du mandat et des responsabilités des municipalités. Nous applaudissons les communautés qui optent pour cette direction, mais nous n’exerçons aucune pression », a indiqué Carole Payne, porte-parole du ministre, à L’Acadie Nouvelle.

Dans le Grand Nord

Après des mois de consultations publiques, les Territoires du Nord-Ouest (TNO) et le Nunavut se préparent à adopter ce qui pourrait bien être la plus sévère loi antitabac régissant les lieux publics au pays. Comptant presque 70 000 habitants (28 700 au Nunavut et 41 000 aux TNO), ces territoires nordiques comportent de très fortes proportions de fumeurs (les deux tiers des adultes du Nunavut fument). En plus d’interdire la vente aux mineurs, de bannir la cigarette de tous les lieux publics y compris les bars, cette loi proscrirait aussi l’aménagement de salles ventilées pour fumeurs. Selon la Commission des accidents du travail (Workers’ Compensation Board) des Territoires du Nord-Ouest et du Nunavut, la nouvelle réglementation pourrait entrer en vigueur dès cet automne.

Le Maine sans fumée

Un second voisin du Québec deviendra bientôt totalement sans fumée. Fin juin, le gouverneur de l’État du Maine, John Baldacci, a entériné un projet de loi qui éliminera la fumée de tabac des bars, tavernes et salles de bingo ou de billard à compter du 1er janvier 2004. « Ne vous méprenez pas, a assuré le gouverneur Baldacci, les fumeurs resteront les bienvenus dans tout l’État du Maine. Nous leur demandons simplement de laisser leurs mégots à la porte des établissements, de manière à mieux protéger la santé des personnes autour d’eux. » Le projet de loi fut d’abord adopté par de fortes majorités, une semaine auparavant, par le Sénat et la Chambre des représentants.

Surnommé Land of Remembered Vacations (La contrée des vacances inoubliables), cet État touristique de 1 300 000 habitants avait banni l’usage du tabac de ses restaurants dès octobre 1999. Situé à l’extrémité nord-est des États-Unis, le Maine est l’État ayant la plus longue frontière commune avec le Québec (près de 300 km), joignant les régions de l’Estrie, de Chaudières-Appalaches et du Bas-Saint-Laurent. Il devient le 5e État américain à retenir une législation complète antitabac (incluant les bars), après la Californie, le Delaware, le New York et le Connecticut. Dans l’État de New York, autre voisin du Québec, cette interdiction totale est entrée en vigueur le 25 juillet.

Des projets allumés

Le forum annuel de la Gang allumé pour une vie sans fumée, une initiative du Conseil québécois sur le tabac et la santé (CQTS), s’est tenu le 30 mai au Cégep Ahuntsic de Montréal. Plus de 350 jeunes « allumés » provenant des quatre coins de la province ont présenté des projets antitabac conçus dans leurs écoles. Créée en 1995, la Gang allumée rallie fumeurs et non-fumeurs de 12 à 18 ans qui réalisent ensemble des activités de prévention et de réduction du tabagisme. Pendant que des sketchs illustraient le tabagisme vu par des yeux d’adolescents, le CQTS tenait simultanément, dans un local voisin, une conférence de presse sur le rôle du tabac au cinéma et dans le milieu de la mode, dans le cadre de la Journée mondiale sans tabac.

D’autre part, veuillez noter que depuis le 7 juillet, le CQTS est déménagé au 4126, rue Saint-Denis, bureau 302, Montréal H2W 2M5. Les numéros de téléphone et de télécopieur demeurent inchangés.

Parole de l’industrie

La Coalition québécoise pour le contrôle du tabac a rassemblé, dans un document-synthèse, quelques citations de l’industrie du tabac évoquant son mépris pour la santé publique. Disponible sur le site www.cqct.qc.ca, ce recueil montre, une fois de plus, que l’information véhiculée à l’intérieur des compagnies diffère énormément de leurs discours publics. Par exemple, même si les fabricants de tabac ont longtemps insinué que leurs produits n’étaient pas nocifs, ils savaient, dès les années 1950, que la cigarette pouvait provoquer certaines maladies. « Des résultats d’études cliniques tendent à confirmer la relation entre l’usage excessif et prolongé du tabac et le cancer du poumon », rapporte un mémo de R. J. Reynolds daté de 1953.