Des obstacles politiques freinent l’application de la Convention-cadre

Alors que les précédentes Conférences mondiales sur le tabac ou la santé ont contribué à la naissance de la Convention-cadre pour la lutte antitabac (CCLAT), lors de la dernière édition, on a fait le bilan des progrès réalisés grâce à ce premier traité international de santé publique, mais aussi des obstacles politiques qui entravent sa mise en oeuvre.

« La CCLAT est le traité le plus rapidement entériné de l’histoire des Nations Unies », a souligné le directeur général de la Société américaine du cancer, le Dr John Seffrin. En seulement trois ans, plus de 70 % des pays membres de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont ratifié la Convention-cadre, s’engageant ainsi à intégrer ses exigences à leurs propres législations.

La Déclaration de Washington, prononcée à la fin de la conférence, renferme des mesures que la communauté de la santé souhaiterait voir ajoutées à la CCLAT. L’une d’entre elle sera de veiller à ce que les enjeux relatifs à la réduction de la pauvreté et du tabagisme soient abordés de façon complémentaire. La Déclaration encourage également les nations qui ont ratifié le traité à offrir une contribution financière proportionnelle à leur PIB (produit intérieur brut), pour sa mise en oeuvre.

Obstacles politiques

Le principal objectif de la conférence tenue à Helsinki en 2003 était la ratification massive de la CCLAT. Maintenant qu’il a été atteint, le défi réside dans son application réelle. Selon Catherine Le Galès-Camus, directrice générale du Département des maladies non transmissibles et de la santé mentale à l’OMS, « il faut s’assurer que toutes les dispositions de la Convention-cadre soient mises en oeuvre, et non seulement certaines ».

Les conférenciers ont insisté sur la responsabilité des organisations et intervenants locaux de veiller à ce que la CCLAT devienne réalité chez eux. Aux États-Unis, le Sénat attend toujours que le président envoie la Convention-cadre pour ratification. Des actions militantes comme des pétitions sont entreprises pour dénoncer ce manque de volonté politique. Une manifestation organisée par des jeunes congressistes a d’ailleurs eu lieu pendant la conférence de Washington.

Directeur de l’École de santé publique de l’Université de Sydney, en Australie, le Dr Simon Chapman a expliqué que les politiciens sont persuadés de la pertinence d’investir dans des mesures de contrôle du tabac, mais qu’ils n’en perçoivent pas l’urgence. « Puisque c’est de vies humaines dont il est question, la réduction du tabagisme doit absolument être une priorité politique », a insisté la directrice de l’Initiative pour un monde sans tabac de l’OMS, la Dre Yumiko Mochizuki-Kobayashi.

Bénéfices actuels et futurs

La Convention-cadre a déjà rendu certains progrès possibles, même là où elle n’a pas encore été ratifiée. En effet, son préambule établit la base de la reconnaissance de principes juridiques du droit à la santé, en vertu desquels les multinationales du tabac pourraient être poursuivies. Enfin, la plus grande conséquence que pourra engendrer la CCLAT, a rappelé Mme Le Galès-Camus. « C‘est d’éviter que 200 millions de personnes ne meurent inutilement du tabagisme. »

La Convention en chiffres

Les 192 pays membres de l’OMS ont participé aux cinq séances de négociations qui ont mené à l’adoption unanime du traité en 2003.

Les 168 États signataires sont ceux qui, parmi les pays-membres, ont indiqué l’appui officiel de leur gouvernement au traité.

Les 135 pays à l’avoir entériné ont accepté d’intégrer ses exigences à leurs lois. En ratifiant, ces derniers sont devenus membres de la Conférence des Parties et ont le droit de voter sur les modifications au traité. Ils représentent plus de 4 milliards de personnes.

Pour qu’elle entre en vigueur, 40 pays devaient ratifier la Convention-cadre. Cet objectif a été atteint en novembre 2004.

Seulement 4 000 000 $ US seront alloués pour soutenir sa mise en oeuvre.

Julie Cameron