Obligation de bonnes pratiques

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Les groupes de santé réclament une révision de la Loi sur le tabac depuis belle lurette au gouvernement du Québec. L’Association pour les droits des non-fumeurs rappelle aux élus qu’un traité international lui impose l’obligation morale de le faire.

Les élus ne savent peut-être pas toujours quelles mesures adopter pour améliorer la santé publique. Dans le cas du tabac, par contre, il existe des documents qui détaillent clairement les meilleures mesures à prendre : la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac et ses directives. Début 2015, l’Association pour les droits des non-fumeurs (ADNF) a rappelé à l’Assemblée nationale du Québec qu’elle était liée par ce traité international adopté par près de 180 pays. Concrètement, cela veut dire que le Québec doit tenir compte de cette convention, notamment au moment de réviser sa Loi sur le tabac, estime Daniel Turp, professeur de droit à l’Université de Montréal, dans un avis juridique rédigé à la demande de l’ADNF.

La convention-cadre : une obligation légale

M. Turp le reconnaît d’emblée dans cet avis de neuf pages : ce n’est pas le Québec, mais bien le Canada qui a signé la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac, en 2003. En 2006, toutefois, le Québec a adopté un décret le déclarant lié par cette convention. « Il est raisonnable de croire qu’un gouvernement qui se dit lié par un traité en respectera les termes », déclare François Damphousse, directeur du bureau du Québec de l’ADNF. Pour s’en assurer, la Convention de Vienne sur le droit des traités – que le Canada a aussi signée – stipule tout de même que « tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté par elles de bonne foi. » Les obligations du Québec découlant de la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac tiennent à la convention elle-même et aux directives qui en découlent. La convention établit des principes généraux : par exemple, les emballages des produits du tabac ne doivent pas contribuer à une promotion fallacieuse, tendancieuse ou trompeuse de ces produits. Les directives détaillent comment y arriver : par exemple, en adoptant l’emballage neutre (voir l’article à la une).

Révision de la loi : une nécessité

En juin, cela fera dix ans que la Loi sur le tabac du Québec n’a pas été révisée. La ministre Lucie Charlebois a réitéré à plusieurs reprises sa volonté d’agir dans ce dossier, mais n’avait pas encore déposé de projet de loi au moment de mettre sous presse. Dans une autre lettre envoyée aux députés, l’Association pour les droits des non-fumeurs cible quatre mesures recommandées par la Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac et ses directives que le Québec devrait adopter. Parmi celles-ci, mentionnons l’adoption de l’emballage neutre et standardisé ainsi que l’interdiction de toutes les saveurs dans les produits du tabac, incluant le menthol. Ces mesures, déjà mises oeuvre avec succès dans d’autres pays, recueillent aussi l’appui de l’ensemble des groupes de lutte contre le tabagisme du Québec.

Les directives : un manuel des bonnes pratiques

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« Les directives sont une liste des meilleures pratiques. Il est indispensable qu’un gouvernement les mette en oeuvre s’il souhaite se conformer à la convention. » – François Damphousse, Directeur du bureau de Québec de l’ADNF

« Les directives sont une liste des meilleures pratiques, dit François Damphousse. Il est indispensable qu’un gouvernement les mette en oeuvre s’il souhaite se conformer à la convention. Concrètement, le gouvernement de Philippe Couillard pourrait examiner les mesures recommandées par les directives et ajuster la Loi sur le tabac en conséquence. » Daniel Turp abonde dans le même sens. Même si les directives n’imposent aucune obligation légale aux signataires de la conventioncadre, le professeur de droit estime que le Québec doit « s’acquitter de ses obligations juridiques en se conformant à la Convention-cadre et en appliquant ses directives. » En effet, les directives visent à « permettre aux Parties [c’est-à-dire les pays qui ont signé la Convention] de s’acquitter de leurs obligations juridiques », écrit-il. Bref, le Québec a bien des outils en main pour réviser au mieux sa Loi sur le tabac. Ne reste plus à Lucie Charlebois, ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la jeunesse et à la Santé publique, qu’à aller de l’avant.

Anick Perreault-Labelle