Cinq grands centres commerciaux de la région montréalaise seront sans fumée à partir du 1er mars

C’est à un gestionnaire immobilier que l’on doit l’exploit d’avoir éloigné un peu les médias québécois des pannes d’électricité du début de 1998, pour les intéresser à la Semaine québécoise sans fumer tenue du 19 au 25 janvier. Lors du lancement de la Semaine, en conférence de presse au Centre Eaton de Montréal, le Conseil québécois sur le tabac et la santé s’était associé à la Corporation Cadillac Fairview pour annoncer la nouvelle politique sans fumée de cinq centres commerciaux.

Bien que le Conseil ait tenté de rendre publics les résultats préliminaires de l’Opération espaces sans fumée et les activités de la Semaine, les médias ont surtout accordé l’attention à l’interdiction de fumer qui entrera en vigueur le 1er mars au Centre Eaton, aux Galeries d’Anjou, aux Promenades St-Bruno, au Carrefour Laval et au centre Fairview Pointe Claire. Le dirigeant principal du portefeuille de l’est du Canada chez Cadillac Fairview, Normand Blouin, aurait obtenu pas moins de 35 citations dans les médias, selon le relevé de presse de l’entreprise.

Après une semaine, les réactions publiques à l’annonce du géant immobilier étaient presque toutes positives, notamment un éditorial d’appui du quotidien The Gazette. La principale exception fut un article du Journal de Montréal du 27 janvier, intitulé « Les marchands craignent que les fumeurs aillent magasiner ailleurs ». Quant à la préposée au kiosque d’information des Promenades St-Bruno, elle a rapporté n’avoir reçu que des félicitations.

La Place Ville-Marie avait ouvert la voie québécoise des centres commerciaux sans fumée, le 1er juin 1994, suivie par le Complexe Desjardins le 15 janvier 1996. Cependant, ces deux politiques innovatrices découlent en partie du fait que des employés de bureau venaient en grand nombre fumer devant les magasins. Certaines municipalités interdisent aussi le tabac dans les centres commerciaux, notamment Westmount et LaSalle; cependant, l’application de ces interdictions est assez faible.

L’initiative de Cadillac Fairview est formidable, non seulement du fait qu’elle provient des besoins de sa clientèle (et non pas d’une invasion de fumeurs venus d’ailleurs), mais par l’importance des cinq méga-centres visés. Soit dit en passant, la décision du « portefeuille de l’est » a été prise au Québec par des Québécois francophones. Il ne s’agit pas d’une directive venue de New York ou de Toronto!

Le 12 décembre, Normand Blouin a d’ailleurs écrit au premier ministre Bouchard, l’informant en primeur de la future politique de Cadillac Fairview et lui demandant d’inclure les centres commerciaux dans le projet de loi québécois sur le tabac « que s’apprête à déposer à l’Assemblée nationale le ministre de la Santé et des Services sociaux, l’honorable Jean Rochon ». M. Blouin n’a eu droit qu’à un accusé de réception laconique de la coordonnatrice de la correspondance!

Opération espaces sans fumée

Malgré les problèmes de poste et d’électricité et le peu d’appui des médias à faire connaître l’Opération espaces sans fumée, 53 entreprises ou organismes, totalisant 33 000 employés, se sont inscrits à cette campagne du CQTS, qui vise à implanter ou à accroître avant le 1er juin des lieux sans fumée au travail. Il s’agit d’un résultat plus faible que l’année dernière (126 employeurs, totalisant 40 000 employés); par contre, l’engagement est sans doute plus significatif puisque l’inscription n’était plus gratuite, mais à un coût de 25 $.

Message radio

D’autre part, le CQTS a fait parvenir aux 78 postes de radio francophones du Québec un message d’intérêt public de 30 secondes sur la Semaine. Il s’agissait d’un dialogue humoristique entre deux fumeurs interprétés par l’humoriste Pierre Verville. La plupart des postes l’auraient diffusé, selon un sondage téléphonique. L’Association pulmonaire du Québec (APQ), qui en était à sa 23e Semaine sans fumée, avait proposé six autres messages lus par le très radiophonique Jocelyn Cormier.

1 888 POUMON-9

L’APQ a « rendu publiques » ses activités lors d’une autre conférence de presse à Montréal, celle-là repoussée au jeudi de la Semaine à cause de la crise des pannes de courant qui s’éternisait. Il était regrettable d’y constater le peu de grands médias présents, comme c’est parfois le cas dans les événements antitabac. L’APQ y a lancé, avec la collaboration de l’Ordre professionnel des inhalothérapeutes du Québec, la ligne 1 888 POUMON-9, qui offrira jusqu’au 13 février (de 9h à 21h, 7 jours par semaine) les conseils gratuits d’inhalothérapeutes à ceux et celles qui essaient de cesser de fumer. Venant tout juste d’écraser, la journaliste Pénélope McQuade, de Salut Bonjour (sur TVA), a inauguré ce service.

Les principales autres activités de l’APQ étaient le Bébé sans fumée (Louis Gagné, né le 21 janvier) et le Défi 24 heures (pour les écoles et entreprises). Le directeur des communications Jocelyn Cormier a également fait connaître le nouveau Fonds d’éducation et de prévention du tabagisme de l’APQ, d’un objectif de 100 000 $, qui vise à sensibiliser les jeunes du secondaire aux dangers du tabac.

Société canadienne du cancer

Pour sa part, la Société canadienne du cancer a profité de la Semaine pour faire distribuer, par ses bénévoles, des épinglettes On change d’air dans quelque 25 centres commerciaux. Dans les Laurentides et la Côte-Nord, elle a aussi tenu un concours primant la meilleure section non-fumeurs dans les restaurants. Les non-fumeurs pouvaient découper un coupon de participation dans leur journal local avec, comme prix en jeu, un repas pour deux personnes dans la section non-fumeur la plus appétissante de la région!

Initiatives régionales

La plupart des directions régionales de santé publique ont réalisé des activités de sensibilisation. À la lecture des Verbatim (relevés des médias radio et télé), signalons le succès des interventions dans le Bas-St-Laurent, dans l’Outaouais, dans Chaudière-Appalaches et au Saguenay Lac-St-Jean.

Croque la vie

Plusieurs émissions de télévision et de radio ont été consacrées à la Semaine, notamment Croque la vie, sur Canal Vie du lundi au vendredi de 18h à 19h. Cette série axée sur la cessation était commanditée par Nicorette et Santé Canada, dont les publicités étaient souvent répétées.

Sans fumer, sans fumée ou sans tabac

Le titre de Semaine québécoise sans fumer fera bientôt l’objet d’une évaluation au CQTS et au ministère. Il y a confusion fréquente entre le verbe « sans fumer » et le nom « sans fumée » parmi les intervenants et les journalistes. (Le titre actuel est une traduction de la National Non-Smoking Week.) L’orthographe de fumer dans « Semaine québécoise sans fumer » est une des questions les plus souvent posées à Info-tabac!

De plus, le renoncement à fumer pour une semaine est une activité guère réalisable à cause de la dépendance à la nicotine. À Info-tabac, nous avions suggéré Semaine québécoise contre le tabagisme, mais plusieurs personnes n’aiment pas les termes contre ou anti. Une Semaine pour un Québec sans tabac ferait peut-être consensus, même si c’est copié sur notre sous-titre Mensuel pour un Québec sans tabac. Si vous avez des opinions ou des suggestions sur le nom de la Semaine, n’hésitez pas à les communiquer au CQTS ou au ministère.

Denis Côté