Nouvelles brèves

Centenaire d’Imperial

Imperial Tobacco Canada (ITC), leader du tabac au pays, célèbre son centenaire en 2008. Cependant, la firme semble être la seule à fêter. Elle avait prévu le dévoilement d’une sculpture de glace, le 11 janvier, en présence de la députée de Saint-Henri et ministre responsable des Aînés, Marguerite Blais. Mais la ministre s’est décommandée, prétextant une erreur de communication avec son bureau de circonscription. Quant à la cérémonie, elle a été annulée en raison de la température élevée qui faisait fondre la sculpture.

ITC craignait sans doute aussi la chaleur d’une manifestation de groupes de santé et d’autres sympathisants antitabac qui ont, à la place, dévoilé le nombre de décès causés par ses produits depuis 1908, une hécatombe estimée à un million de morts. La Coalition québécoise pour le contrôle du tabac fut choquée que le cigarettier ait tenté de faire reconnaître sa contribution au quartier montréalais de Saint-Henri, à l’économie ou au patrimoine artistique. « Vous êtes plutôt les champions de la souffrance, des maladies et des décès évitables dans notre société. Votre vraie contribution, c’est la mort », a lancé son coordonnateur Louis Gauvin devant le siège social. Aucun média n’aurait rapporté le communiqué de presse d’Imperial, pourtant long de sept pages.

Fumez québécois

Imperial Tobacco Canada (ITC) n’est guère populaire. Après le boycott des rencontres qu’elle avait instiguées sur la contrebande et sur le snus, après la manifestation dénonçant son centième anniversaire, voilà que des syndicats demandent de délaisser ses produits. Les employés des usines concurrentes, soit celle de Rothmans Benson & Hedges à Québec et celle de JTI-Macdonald à Montréal, ont lancé une campagne sous le slogan Fumez québécois! – Sauvez des emplois ici! À la fin janvier, des annonces dans les journaux incitaient à ne plus acheter les marques du Maurier, Player’s et Peter Jackson, car elles sont maintenant fabriquées au Mexique. En effet, pour épargner sur les salaires, ITC a fermé ses deux usines canadiennes (Montréal en 2003 et Guelph en 2006) pour importer ses cigarettes d’une autre compagnie de la multinationale British American Tobacco.

Les « travailleurs québécois du tabac » (sic) félicitent ceux qui ont réussi à cesser de fumer, mais prient les fumeurs restants de les encourager. Car ils sont très bien rémunérés, de 32 $ à 52 $ l’heure, voit-on dans leurs conventions collectives accessibles sur Internet. Si leurs usines devaient fermer à leur tour, ces syndiqués auront droit à une compensation moyenne d’environ 5 000 $ par année d’ancienneté.

Pastilles Nicorette

La compagnie Soins-santé grand public McNeil n’a pas tardé à réagir au lancement canadien des pastilles de nicotine Thrive, proposé par son compétiteur Novartis Pharma Canada. Le distributeur de la gomme et de l’inhalateur Nicorette vient de mettre sur le marché une pastille éponyme à saveur de menthe. Bien que peu annoncé et encore difficile à trouver, le nouveau produit est offert en posologies de 2 ou 4 milligrammes de nicotine, cela en boîtes de 24 ou 96 pastilles.

Les pastilles ne sont pas remboursées par le régime d’assurance médicaments du Québec, lequel couvre toutefois le Zyban et le Champix, de même que les timbres Nicoderm et Habitrol, en plus des gommes Nicorette et Thrive. Signalons que les chaînes Wal-Mart et Pharmaprix proposent des gommes, pastilles et timbres de marques maison, un peu moins dispendieux mais non remboursés par le régime québécois.

Poursuite du Nouveau-Brunswick

Après la Colombie-Britannique, le Nouveau-Brunswick devient la deuxième province à poursuivre en justice les compagnies de cigarettes pour les préjudices causés à la santé et pour le fardeau financier supporté par le régime médical public. À la mi-mars, Fredericton a annoncé avoir retenu les services d’un consortium d’avocats locaux, de l’Ontario et des États-Unis qui toucheront un pourcentage des montants obtenus. Les avocats américains avaient participé au règlement d’un certain nombre de poursuites avec les États. « Les compagnies de tabac doivent rendre des comptes, et nous avons l’intention d’être parmi les premiers à y voir », a déclaré le procureur général Thomas J. Burke.

Ne voulant pas ouvrir le chemin vers des dédommagements en faveur des autres provinces, surtout pas les plus populeuses, l’industrie du tabac se défendra avec acharnement. Qualifiant ironiquement le gouvernement néo-brunswickois de « partenaire majeur » du fait qu’il empoche plus d’argent de ses cigarettes qu’elle-même, la compagnie Imperial Tobacco Canada s’est dite navrée de la poursuite qui ne serait pas dans l’intérêt des contribuables. Elle rappelle que la Colombie-Britannique a déjà investi plus de 20 millions $ dans une saga judiciaire qui perdure depuis dix ans.

Quatre autres provinces ont adopté des lois qui facilitent une éventuelle poursuite contre les cigarettiers, soit la Nouvelle-Écosse, Terre-Neuve-et-Labrador, le Manitoba et la Saskatchewan. Selon Michael Perley, directeur de la coalition ontarienne antitabac (Ontario Campaign for Action on Tobacco), les provinces canadiennes pourraient obtenir une compensation similaire à celle déjà arrachée par les États américains, qui s’élève à 245 milliards $ US sur 25 ans. À l’échelle du Québec, cela représente environ 250 millions $ par année.

Journée mondiale sans tabac

Jeunesse sans tabac, tel est le thème de la Journée mondiale sans tabac 2008, qui se tiendra le 31 mai sous l’égide de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). On compte aujourd’hui environ 1,8 milliard de jeunes âgés de 10 à 24 ans dans le monde, dont plus de 85 % dans les pays en développement, indique l’OMS sur son site Web. Ayant survécu à la période plus vulnérable de l’enfance, ces jeunes sont généralement en bonne santé. Toutefois, l’industrie du tabac intensifie ses efforts pour attirer parmi eux de nouveaux consommateurs en espérant les fidéliser pour le restant de leurs jours. L’expérience du tabac au cours de l’enfance et de l’adolescence peut facilement déboucher sur une dépendance pour le reste de la vie.

L’OMS lance un appel aux responsables politiques, aux jeunes, aux ONG et au public, pour qu’ils mettent en oeuvre des politiques et des programmes qui visent l’ensemble de la population, telles que l’interdiction de toutes les formes de publicité, l’augmentation des taxes et la création de milieux 100 % sans fumée. Elle signale que ces mesures, qui ciblent aussi les adultes, sont les plus aptes à réduire la consommation de tabac chez les jeunes.

Le gouvernement du Québec profite de cette campagne mondiale pour mettre en vigueur deux dispositions de sa Loi sur le tabac, soit l’interdiction des étalages de cigarettes dans les points de vente et la fermeture des derniers fumoirs dans les lieux de travail.

À bas la promo

Plus de deux cents personnes étaient réunies au chic hôtel Holiday Inn du centre-ville de Montréal, le vendredi 14 mars, pour discuter de la promotion du tabac. Des experts en marketing de l’industrie? Non, surtout des adolescents d’écoles secondaires conviés par le Conseil québécois sur le tabac et la santé (CQTS) et l’Agence de la santé et des services sociaux de Montréal, afin de s’outiller contre les techniques de mise en marché des cigarettes et des cigarillos. À l’approche du bannissement des étalages de tabac dans les points de vente, il a été jugé opportun d’obtenir l’appui du réseau de La gang allumée pour une vie sans fumée, le programme d’intervention du CQTS chez les jeunes. Monique Lalonde, de la Direction de la santé publique de Montréal, indique de surcroît que des études démontrent qu’élever le sens critique des adolescents face aux pratiques prédatrices de l’industrie, est une des meilleures façons de les tenir loin du tabac; leur côté rebelle est alors redirigé contre le fabricant, au lieu que ce côté serve à ennoblir le produit interdit.

Les jeunes ont eu droit à des ateliers animés par les experts québécois du domaine, portant sur le plaidoyer, la mobilisation, la médiatisation du message et la réalisation de projets. Des prix ont été décernés aux gagnants d’un concours axé sur la dénonciation de la promotion du tabac. L’expérience et la formation obtenues au Forum Fais-toi entendre! pourront servir non seulement à la réduction du tabagisme, mais à toute autre cause méritante.

Conférence indienne

Les intéressés ont jusqu’au 26 mai pour proposer leurs présentations en vue de la 14e Conférence mondiale sur le tabac OU la santé qui aura lieu du 8 au 12 mars 2009 à Mumbai en Inde. Autrefois appelée Bombay, Mumbai a dépassé Calcutta à titre de plus grande ville du pays, avec quelque 12 millions d’habitants. Ce sera la première fois en 12 ans que la conférence mondiale se tiendra dans un pays émergent, après la capitale chinoise Beijing en 1997. Entre-temps, elle fut présentée successivement à Chicago (2000), Helsinki (2003) et Washington (2006). L’Inde est le deuxième plus grand producteur et consommateur de tabac au monde, après la Chine. Plus de 700 000 Indiens décèdent annuellement de maladies causées par le tabac, dont 550 000 hommes de moins de 69 ans. Alors que la lutte contre le tabagisme connaît certains succès dans les pays développés, en bénéficiant du soutien gouvernemental, c’est loin d’être la situation dans les pays en développement. Au contraire, l’industrie du tabac y est souvent perçue comme un important atout économique. La région Asie-Pacifique est fortement accablée par « l’épidémie du tabac ».

La conférence mondiale est une riche occasion pour de nombreux groupements et professionnels, tant au niveau régional, national qu’international, de participer, de partager et d’apprendre, indique le site Web de l’événement (www.14wctoh.org). La langue de communication est surtout l’anglais. Les frais d’inscription sont fixés à 21 000 roupies (540 $C), si reçus avant le 15 septembre. Pour consulter les articles d’Info-tabac sur les conférences mondiales depuis 1997, voir nos numéros 9, 34, 47 et 65.

France bien éteinte

Les sceptiques ont été confondus. Comme leurs cousins québécois en juin 2006, les Français ont immédiatement respecté leur interdiction de fumer dans les bars et les restaurants, entrée en vigueur le 2 janvier dernier. Les articles de presse font état d’un respect général et total de la loi, sauf de rares exceptions rurales. Cette révolution a entraîné une baisse des ventes de cigarettes de 6,3 % au mois de janvier, selon le magazine des buralistes Le Losange. Cette réduction a été confirmée par British American Tobacco, qui l’estime à 6,4 % sur deux mois. Le gouvernement français n’a pas l’intention d’accorder quelque sursis ou exemption aux hôteliers, restaurateurs, cafetiers et traiteurs qui se plaignent d’une diminution de leur chiffre d’affaires. Fin février, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, a indiqué à leur représentant « que le président de la République (Nicolas Sarkozy) lui avait bien confirmé qu’il n’y aurait pas de révision du décret ».

L’interdiction de fumer s’est accompagnée d’une baisse d’environ 15 % des infarctus et accidents vasculaires cérébraux en France, selon un rapport remis au ministère de la Santé et basé sur les admissions dans les hôpitaux. Son auteur, le pneumologue Bertrand Dautzenberg, a avoué sa surprise devant cet impact immédiat. Il a expliqué à l’Agence France-Presse que « la fumée crée très rapidement une modification de la coagulation du sang, l’hémostase, or c’est elle, quand elle crée des caillots, qui bouche les vaisseaux ».