Acti-menu remet la priorité sur l’éducation pour faire reculer le tabagisme imposé aux enfants

Pour bien marquer auprès des parents fumeurs que sa campagne contre le tabagisme involontaire dans les domiciles québécois n’est pas une entreprise déguisée pour les faire arrêter de fumer, l’équipe du programme Acti-menu de l’Institut de cardiologie de Montréal est repartie à l’assaut des consciences, le 23 septembre dernier, avec le nouveau slogan « Pour la santé des enfants, merci de fumer dehors ».

Au petit écran, le message publicitaire de la campagne a notamment donné à voir une petite fille sur le point de dormir qui, en envoyant un baiser à sa maman, expire de la fumée.

Le slogan des dernières années, « Pas de boucane dans ma cabane! », les chœurs d’enfants le scandant impatiemment dans des annonces télévisées, ainsi que les affichettes à apposer dans les logements pour claironner aux visiteurs la volonté des parents d’un environnement sans fumée : tout cela a été mis de côté.

Lors de phases ultérieures de la campagne Famille sans fumée, Acti-menu invitera les parents à passer à l’action afin que les fumeurs parmi les membres de la famille ou les visiteurs aillent fumer à l’extérieur de la maison et de la voiture.

Pour l’heure, toute la place est donnée à l’information sur les méfaits de la fumée secondaire de tabac pour la santé des enfants.

Pour faire passer ce message et pour relancer la chasse aux mythes complaisants, la conférence de presse qui inaugurait la campagne 2010 a offert le microphone de porte-parole à trois disciples d’Hippocrate, passionnées de prévention et dotées d’une solide expérience, particulièrement en médecine familiale : les docteures Johanne Blais, Christiane Laberge et Roxane Néron.

Intoxication : un peu de physiologie

Les enfants sont particulièrement touchés par la fumée à leur domicile, ont souligné les trois médecins. Un adulte non-fumeur fréquemment indisposé par la fumée du tabac peut parfois déménager et s’installer dans un milieu plus sain, mais un enfant n’est pas encore capable d’agir ainsi. De plus et surtout, sa respiration est différente.

À première vue, étant plus petits, et ayant de moins grands poumons, les enfants ne devraient pas inhaler plus que leur part de la pollution qui règne dans une habitation. Sauf qu’ils respirent nettement plus vite, car leur système respiratoire n’est pas complètement développé. En conséquence, ils s’intoxiquent encore plus vite que les adultes. Par-dessus le marché, les défenses immunitaires chez le bambin sont moins développées que chez l’adulte, et les enfants sont donc plus susceptibles d’être atteints d’infections du système respiratoire lorsque leurs corps sont affaiblis par une exposition fréquente à la fumée.

Des études scientifiques ont aussi fait le lien entre le tabagisme passif, d’une part, et d’autre part, la plus grande fréquence des otites et des troubles de l’apprentissage. Même la rare mais sinistre mort subite du nourrisson frappe davantage chez les bébés exposés à la fumée secondaire que chez les autres bébés.

De façon générale, à tous âges, l’exposition à la fumée est souvent associée à des irritations des yeux, du nez et de la gorge, ainsi qu’à des sinusites, des maux de tête, des étourdissements et des nausées. Quand l’exposition est prolongée, la toux, les crises d’asthme, la bronchite et la pneumonie sont plus souvent au rendez-vous dans les familles enfumées que chez les autres.

Fausses pistes et solution

Les trois porte-parole de la campagne Famille sans fumée ont voulu prévenir les parents fumeurs contre certaines illusions. Fumer dans une pièce fermée, en espérant que la pollution ne se répandra pas dans le logement en passant sous la porte ou par d’autres ouvertures, n’est pas une solution. Fumer avec la fenêtre ouverte ou sous la hotte de la cuisine avec le ventilateur allumé n’est pas non plus une solution à la hauteur du problème, car le drainage de l’air pollué n’est pas assez efficace. Fausse piste semblable avec l’idée de fumer quand les enfants sont absents, puisque quantité de polluants finissent par saturer l’atmosphère et s’incruster dans les moquettes, les meubles, les rideaux et les vêtements. Quant aux « assainisseurs » d’air, ils ne font que masquer les odeurs sans dépolluer vraiment; tandis que les filtres à air filtrent les particules solides dans la fumée, mais pas les gaz.

La seule façon de protéger ses proches, c’est d’aller fumer dehors.

Pierre Croteau