Le procès est encore retardé
Décembre 1997 - No 13
Contestation en Cour supérieure : les escarmouches préliminaires entre les fabricants de cigarettes, le gouvernement fédéral et la Société canadienne du cancer à propos de la constitutionnalité de la loi C-71 risquent de se prolonger au moins jusqu’au printemps.
Lors d’une audience préparatoire le 11 novembre, la juge Danielle Grenier de la Cour supérieure du Québec a refusé la demande d’un des procureurs de l’industrie qui voulait qu’elle fixe tout de suite une échéance pour le début du procès dans ce litige qui oppose les trois principaux cigarettiers canadiens au Procureur général fédéral. Il y a quelques mois, la juge Grenier tenait encore absolument à ce que le procès commence dès le mois d’octobre; elle semble maintenant se résigner à ce que les procédures s’éternisent comme cela avait été le cas pour l’ancienne Loi réglementant les produits du tabac.
Malgré les protestations des fabricants, qui laissaient entendre qu’il s’agissait de méthodes dilatoires, les avocats du Procureur général ont reçu l’autorisation de la cour de procéder à des interrogatoires au préalable d’au moins trois témoins des compagnies de tabac. Au mois d’août, le gouvernement avait déclaré à la cour qu’il n’aurait pas besoin de tels interrogatoires pour préparer sa défense de la loi C-71; après avoir examiné 70 caisses de documents produits par l’industrie, les avocats fédéraux ont changé d’avis.
La juge Grenier a infligé une autre petite défaite aux cigarettiers en permettant aux avocats de la Société canadienne du cancer, qui a le statut d’intervenante dans cette cause, d’assister à ces interrogatoires des témoins de l’industrie. On ne sait toujours pas si les avocats de la Société auront le droit d’examiner à l’avance les documents fournis au Procureur général.
Me Rob Cunningham, militant antitabac bien connu et auteur de l’ouvrage La guerre du tabac dont nous avons parlé à plusieurs reprises, a eu droit à des attentions particulières du procureur de RJR-Macdonald, Colin Irving. Me Irving a tenté de convaincre la juge Grenier que son confrère devait être exclu de l’équipe d’avocats de la Société canadienne du cancer autorisés à assister aux interrogatoires au préalable.
Selon Me Irving, Me Cunningham a une attitude trop militante et risque de ne pas respecter l’entente de confidentialité concernant les documents échangés entre les parties. La preuve? Le fait qu’il parle dans son livre de « guerre » entre l’industrie du tabac et la santé publique.
La juge Grenier a déclaré qu’elle n’approuvait pas forcément le langage de Me Cunningham, mais qu’elle refusait de pratiquer de la discrimination envers quelqu’un qui est dûment inscrit au barreau et qui agit dans cette cause-ci à titre d’avocat et non d’activiste.
Francis Thompson