La loi sur le vapotage au Québec doit être révisée

On dit souvent que l’histoire se répète, et c’est exactement ce qui se produit avec l’épidémie du vapotage, comme ce fut le cas avec celle du tabagisme!

La législation sur le tabac est apparue assez longtemps après l’épidémie et a laissé bien des marques dans notre société. Les industries du tabac ont pu compter sur l’assuétude de dizaines de millions de consommateurs disséminés dans le monde, tout en cherchant continuellement à gagner de nouvelles parts du marché. En présence du déclin lent, mais constant, du tabagisme, les cigarettiers ont misé sur l’apparition de nouveaux produits et de nouvelles technologies, comme les produits de vapotage, pour attirer de nouveaux consommateurs.

La cigarette électronique, décrite comme une solution de rechange moins néfaste que la cigarette, est désormais surtout consommée comme produit récréatif chez les jeunes.

Lois en place pour contrer le vapotage au Québec

Le manque de lois liées aux produits de vapotage a malheureusement permis aux jeunes d’accéder facilement à ces produits et d’en devenir adeptes, souvent malgré eux. Certaines lois ont fait leur apparition dans un cadre fédéral ou provincial au cours des dernières années. Depuis 2015, au Québec, les produits de vapotage sont soumis aux mêmes règlements que les produits du tabac en ce qui vise la vente, la promotion, la publicité et les lieux d’utilisation. En 2018, le gouvernement fédéral, en adoptant sa Loi sur le tabac et les produits de vapotage, a légalisé la vente de produits de vapotage contenant de la nicotine.

Les lois et mesures en place visant les produits de vapotage au Québec :
  • La taxe d’accise fédérale sur les produits de vapotage, ces produits étant aussi soumis à la TPS et à la TVQ.
  • L’interdiction des publicités et de la présentation des produits de vapotage dans les magasins, à l’exception des magasins de vapotage ouverts aux adultes seulement.
  • L’interdiction de l’affichage, à l’exception des magasins de vapotage ouverts aux adultes seulement.
  • L’interdiction des ventes de produits de vapotage sur Internet.
  • L’interdiction des incitations chez les détaillants.
  • L’interdiction de la publicité des produits de vapotage à la radio, à la télévision sur Internet et, finalement, dans les publications écrites, sauf si le lectorat est composé à 85 % d’adultes.
  • L’interdiction de la publicité des produits de vapotage sur les panneaux d’affichage et les enseignes extérieures.
  • L’interdiction des publicités sur les produits de vapotage et sur le style de vie.
  • L’interdiction de parrainer des produits de vapotage.
  • L’interdiction des publicités des produits de vapotage qui attirent les jeunes.
  • La teneur maximale en nicotine fixée à 20 mg/ml (loi fédérale, juillet 2021).
  • La mise en garde sur la santé, apposée sur les emballages des produits de vapotage.
À quand l’interdiction des saveurs dans les produits de vapotage au Québec?

Les instances qui sont mobilisées dans la lutte contre le tabac et les produits de vapotage attendent l’arrivée d’un nouveau règlement sur la restriction des saveurs dans les produits de vapotage. Rappelons que 51 % des jeunes vapotent surtout en raison des produits aromatisés.

Évidemment, les industries, ainsi que leurs faire-valoir, s’opposent à cette loi. Selon eux, la fin des arômes dans les produits de vapotage ne ferait qu’inciter les gens à se tourner vers la cigarette. Ce constat ne s’appuie sur aucune recherche. Ils craignent, bien entendu, de perdre leur jeune clientèle, quoiqu’ils allèguent ne pas la cibler directement.

En outre, les produits de vapotage sont consommés en grande partie par des personnes n’ayant jamais fumé ou qui fument et vapotent à la fois. Bien que l’argument de recourir à la cigarette électronique comme outil de cessation soit toujours mis de l’avant, la grande majorité des scientifiques présents à la 15e Conférence annuelle d’Ottawa (Approches cliniques : nouvelles tendances en matière d’abandon du tabac) s’entend pour affirmer que l’efficacité de la cigarette électronique comme moyen de cessation reste toujours à démontrer.

L’interdiction des arômes dans les produits de vapotage est au cœur de discussions menées par le gouvernement provincial depuis 2021. Le ministre Christian Dubé souligne que la majorité des députés sont en faveur de l’interdiction des saveurs. Le Québec ne devrait pas tarder à emboîter le pas à la Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, à l’Île-du-Prince-Édouard et aux Territoires du Nord-Ouest, qui ont déjà institué des règlements à ce sujet.

Recommandations émises par le directeur national de santé publique

Les méfaits connus du vapotage sur la santé sont de plus en plus nombreux. C’est pourquoi la santé publique avait émis, en 2020, sept recommandations au gouvernement caquiste[2] :

  1. Interdire la vente des produits de vapotage comportant une saveur ou un arôme autres que ceux du tabac, comme c’est le cas pour les produits du tabac.
  2. Limiter à 20 mg/ml la concentration maximale en nicotine de tous les produits de vapotage ainsi qu’encadrer la capacité des réservoirs et le volume maximal des bouteilles de liquides à vapoter.
  3. Instaurer un permis de vente pour les produits de vapotage et, par souci de cohérence, instaurer un permis de vente pour les produits du tabac.
  4. Diminuer la densité des points de vente de produits de vapotage à proximité des établissements d’enseignement.
  5. Appuyer l’adoption d’une taxe spécifique provinciale sur les produits de vapotage;
  6. Établir un cadre réglementaire afin de limiter les caractéristiques des produits de vapotage, notamment celles qui peuvent être attrayantes pour les jeunes;
  7. Encadrer de façon stricte les produits émergents, tels que les produits nicotiniques récréatifs sans tabac.

La taxe d’accise fédérale annoncée en octobre 2022 sur les produits de vapotage, qui devait à l’origine entrer en vigueur au début de l’année, sera reportée à l’automne 2023. Le Québec a décidé de suivre l’exemple du Canada en ajoutant une taxe d’accise sur les produits de vapotage pour s’arrimer à celle du gouvernement fédéral.

Les lois mises en place semblent être contournées facilement par les industries du tabac et des produits de vapotage. Celles-ci sont toujours à la recherche de nouveaux produits qui pourraient défier les lois et les règlements, notamment dans le but de séduire les jeunes.

Une question s’impose. Ne devrions-nous pas privilégier une approche préventive en matière de loi sur les produits de vapotage, plutôt que de voir surgir de nouvelles stratégies, toujours plus audacieuses, de la part d’une industrie qui cherche constamment à contourner ces mêmes lois?

 Caroline Normandin, Ph. D.


[1] Traduction libre.

[2] Tiré du Rapport du directeur national de santé publique – Recommandations de mesures visant à mieux encadrer le vapotage.