Nouvelles brèves

Thaïlande : une campagne efficace

Des enfants qui fument sont peut-être l’argument imbattable pour convaincre les fumeurs d’écraser. C’est ce que laisse croire l’impact qu’a eu la publicité Smoking Kid, conçue par l’agence publicitaire Ogilvy pour le compte de la société d’État Thai Health Promotion Foundation.

Cette publicité d’une minute et demie montre des adultes qui fument dans les rues d’une grande ville thaïlandaise, puis des enfants d’environ 10 ans qui les approchent pour leur demander du feu, une cigarette en main. Tous les adultes refusent. Ils disent aux enfants que fumer écourtera leur vie ou les rendra malade. La réaction de ces enfants (et faux) fumeurs : ils tendent une feuille aux adultes avant de s’éclipser discrètement. Sur la feuille en question, on lit alors : « Vous vous inquiétez pour moi; pourquoi pas à propos de vous-même? » On y trouve aussi le numéro de téléphone d’une ligne d’aide à la cessation tabagique.

Presque tous les adultes jettent leur cigarette après avoir lu ce court message, nous dit la publicité. Mais presque aucun ne jette la brochure. Mieux : suite à cette intervention, les appels à la ligne de cessation tabagique ont augmenté de 40 %…

Cigarette électronique

Selon le premier reportage de la saison de La Facture, le 11 septembre, la cigarette électronique devient de plus en plus populaire chez les jeunes au Québec, même parmi les mineurs. Animée par Pierre Craig, La Facture est une émission de Radio-Canada portant sur les droits des consommateurs.

Au Canada, les cigarettes électroniques contenant de la nicotine sont illégales. Il est toutefois possible de s’en procurer. Si elles contiennent de la nicotine, celle-ci, sous forme liquide, est diffusée par une cartouche qui ne comporte pas de tabac. Les cartouches, facilement disponibles sur Internet, renferment aussi de l’eau et une saveur à base de propylène glycol, de glycérine végétale ou de polyéthylène glycol 400. Les risques associés à la cigarette électronique ne sont guère connus à cause du manque d’études sur leurs effets à long terme.

Malgré le fait que les marchands n’aient pas le droit de vendre des cartouches de nicotine, le reportage montre que ce commerce est très peu surveillé. La journaliste n’a pas réussi à obtenir une réaction de la part de Santé Canada, se rendant en vain à la porte de son bureau chef à Ottawa. Santé Canada déconseille néanmoins l’usage des cigarettes électroniques sur son site web. Au Québec, le site web du ministère de la Santé et des Services sociaux dénonce lui aussi l’utilisation de ce produit, affirmant que « la cigarette électronique et d’autres produits équivalents font une entrée massive et soudaine sur le marché québécois ».

Selon La Facture, beaucoup de parents s’inquiètent qu’un enfant de 12 ans puisse acheter des cigarettes électroniques : ils craignent la dissémination d’un comportement qui porterait des jeunes à faire la transition aux cigarettes traditionnelles, en plus de l’influence de l’imitation du tabagisme.

Reprise des recours collectifs

Après une pause estivale de presque deux mois, le procès en recours collectifs contre les trois grands cigarettiers canadiens a repris le 27 août. Les avocats des demandeurs ont continué leurs interrogatoires auprès de dirigeants ou proches d’Imperial Tobacco. Depuis le 18 septembre, ils croisent le fer avec des représentants de JTI-Macdonald (JTI) et le feront ensuite avec ceux de Rothmans Benson & Hedges. Et si l’horaire ne change pas, deux témoins vedettes viendront à Montréal fin novembre. Jeffrey Wigand, un ancien chimiste chez Brown & Williamson (maison sœur d’Imperial Tobacco aux États-Unis) qui a sonné l’alarme contre son ancien employeur, est attendu pour le 14 et le 15 novembre. Son histoire est devenue une légende grâce au film The Insider (L’initié, en français).

Le célèbre transfuge sera suivi de Robert Proctor, un historien de l’Université Stanford qui vient de publier Golden Holocaust : Origins of the Cigarette Catastrophe and the Case for Abolition, une brique portant sur les documents dévoilés en vertu de plusieurs procès contre les fabricants américains.

Emballages neutres australiens
Exemple d’emballage neutre australien, en vigueur à compter de décembre 2012

La Cour suprême de l’Australie a finalement donné raison, le 15 août,  au gouvernement fédéral de ce pays dans le litige l’opposant à l’industrie du tabac concernant l’imposition des emballages neutres. Suite à ce jugement sans appel, les fabricants de cigarettes n’ont eu que 45 jours pour modifier leurs paquets à l’étape de la fabrication. Quant aux détaillants australiens, dès le 1er décembre 2012, ils ne pourront vendre que des produits emballés selon la nouvelle norme, une première mondiale qui fait sensation dans le milieu de la lutte contre le tabagisme. Ces paquets standardisés affichent leurs marques au-dessous d’un imposant avertissement choc, dans un lettrage uniforme sur un fond vert olivâtre.

Selon le plus haut tribunal, la loi imposant les emballages neutres n’est pas contraire à l’esprit de la constitution australienne et ne constitue pas une expropriation illégale de marques de commerce. « C’est une victoire pour toutes les familles qui ont perdu quelqu’un des suites d’une maladie liée au tabac, s’est félicitée la ministre de la Justice Nicola Roxon, citée par l’Agence France-Presse. Le message envoyé au reste du monde est que l’industrie du tabac peut être vaincue. »

De son côté, la ministre de la Santé de France, Marisol Tourraine, avait annoncé en juillet qu’elle allait promouvoir l’instauration du paquet neutre à l’échelle de l’Union européenne. Au Canada, plusieurs organismes de santé ont fièrement salué l’audacieuse démarche australienne, invitant le gouvernement canadien à emboîter le pas, cela même si de nouvelles mises en garde du tabac couvrant 75 % des paquets viennent tout juste d’entrer en vigueur, en juin dernier.

Contrebande amplifiée

Selon une présentation faite en juin par la multinationale Philip Morris (PMI), la contrebande du tabac occupait 14,9 % du volume du marché au Québec en 2011, comparativement à 40,1 % en 2008. Obtenue par la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac, la présentation de PMI, destinée à ses actionnaires, contredit le discours de l’Association canadienne des dépanneurs en alimentation (ACDA), selon lequel le Québec ferait face encore à un marché noir de 30 %.

Par un communiqué émis le 17 septembre, la Coalition dénonce la campagne actuelle de l’ACDA qui ne viserait pas principalement à combattre la contrebande du tabac, mais à empêcher les gouvernements d’agir davantage contre l’industrie légale. « Les fabricants de cigarettes et ses alliés souhaitent conserver l’impression que le taux de contrebande est très élevé et constitue le problème numéro un. C’est ainsi qu’ils peuvent créer une diversion pour décourager l’adoption de nouvelles réglementations, et surtout l’augmentation des taxes, qui sont les plus faibles au pays », souligne Flory Doucas, porte-parole de la Coalition québécoise.

Impasse aux États-Unis

Le 24 août, la Cour fédérale d’appel de la capitale, Washington, a confirmé le jugement d’un tribunal inférieur, émis en février 2012, selon lequel le gouvernement américain, via son Agence de l’alimentation et des médicaments (FDA – Food and Drug Administration), n’avait pas l’autorité pour imposer une série de grandes mises en garde de santé sur les paquets de cigarettes. La cour est d’avis que les neuf messages envisagés dépassent les besoins d’informations factuelles sur les méfaits du tabac en véhiculant des idées militantes. Devant cette défaite, basée sur une décision de deux juges contre un, les autorités sanitaires américaines peuvent soit repenser les mises en garde en y mettant moins de mordant, soit recommander au gouvernement Obama (ou son successeur) d’aller croiser le fer contre les cigarettiers à ce sujet en Cour suprême.

Les messages prévus par la FDA étaient pourtant conformes au style clair et bien illustré déjà utilisé dans une quarantaine de pays, un style instauré par le Canada en 2000. Aux États-Unis, les mises en garde actuelles datent du milieu des années 1980 et ne sont constituées que de phrases discrètes dans de petits rectangles. Par voie de communiqué, la Société américaine du cancer encourage la FDA à poursuivre son travail. « Les avertissements actuels n’ont pas réussi à informer le public des méfaits du tabac. Nous espérons que le gouvernement pourra retenir les manières dont la FDA réussira à implanter les nouvelles mises en garde », a déclaré son directeur général John R. Seffrin.