Poursuite de 1 million $ contre l’industrie canadienne

Une fumeuse ontarienne atteinte d’un cancer du poumon réclame 1 million $ en dommages et intérêts des fabricants Imperial Tobacco et Rothmans, Benson & Hedges.

Ce n’est que la deuxième fois qu’une poursuite individuelle contre l’industrie est intentée au Canada. (La première a été rejetée pour des raisons purement techniques; les juges ont statué qu’il y avait prescription, c’est-à-dire que le délai pour entreprendre des démarches juridiques était déjà écoulé.)

Mirjana Spasic, 51 ans, a décidé de ne pas attendre les résultats d’un recours collectif intenté au nom de tous les fumeurs ontariens. « Elle voulait aller de l’avant sur une base individuelle parce qu’elle est très malade », explique un de ses avocats, Me Andreas Seibert. Mme Spasic risque donc fort de mourir avant que la poursuite plus globale n’aboutisse.

C’est par les médias que Mme Spasic a entendu parler du recours collectif, et de Me Seibert, et par la suite elle a contacté son cabinet pour savoir quelle démarche était préférable dans son cas à elle. Les accusations de négligence, de fausse représentation et de complot sont sensiblement les mêmes dans les deux poursuites.

Il y a un élément nouveau dans la poursuite Spasic : on accuse les fabricants de destruction de preuves. Me Seibert n’a pas voulu commenter cette nouvelle accusation, mais on peut présumer qu’il s’agit de documents internes de l’industrie qui auraient été détruits lorsqu’on s’est aperçu qu’ils pouvaient éventuellement devenir des éléments de preuve accablants.

Les fabricants sont dans l’obligation de répliquer aux accusations au cours du mois de juin. Il est probable qu’ils tenteront de ralentir les procédures, mais Me Seibert garde bon espoir de procéder à l’étape de l’interrogatoire au préalable assez rapidement, ce qui pourrait permettre d’obtenir un certain nombre de documents compromettants que les fabricants ont jusqu’ici réussi à tenir secrets.

Refus des avocats québécois

Au Québec, il semble encore difficile de convaincre un avocat qu’une poursuite contre l’industrie puisse être fructueuse, comme vient de le constater Eric Carsley, un Verdunois dont la femme est morte d’un cancer du poumon il y a un peu plus de trois ans.

M. Carsley, que le deuil a transformé en militant antitabac convaincu, a tout essayé depuis plusieurs mois, en vain, pour trouver un cabinet montréalais prêt à assumer le risque d’intenter une poursuite en dommages et intérêts. Le délai de prescription est maintenant écoulé, et il explore la possibilité d’une poursuite civile aux États-Unis.

Francis Thompson