Cégeps, universités et établissements de santé sans fumée, c’est pour bientôt!
Juin 2016 - No 115
La Loi concernant la lutte contre le tabagisme oblige les cégeps, les universités et les établissements de santé à se doter d’une politique de lutte contre le tabagisme d’ici novembre 2017. Pour les aider, le ministère de la Santé et des Services sociaux vient de publier des orientations sur le sujet.
Des hôpitaux et des CLSC où des efforts encore plus importants qu’autrefois sont mis sur la cessation tabagique et des campus étudiants où la seule « boucane » provient de thés et cafés brûlants. C’est ce monde plus sain que va créer la nouvelle Loi concernant la lutte contre le tabagisme. Selon cette loi, les cégeps, universités et établissements de santé devront se doter d’une politique de lutte contre le tabagisme le 26 novembre 2017 au plus tard. Pour les guider dans cette transition, le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a publié des orientations pour les établissements d’enseignement supérieur et les établissements de santé : deux documents d’une vingtaine de pages chacun offrant à la fois des recommandations et des outils pratiques.
Les bienfaits d’une politique sans fumée
Le MSSS y explique notamment pourquoi il est souhaitable que les établissements d’enseignement postsecondaire éliminent le tabac de leurs bâtiments et terrains. L’une des raisons : encourager les jeunes à ne pas fumer. Après tout, ce sont les jeunes adultes qui comptent proportionnellement le plus de fumeurs : pas moins de 29 % d’entre eux fument, contre 19 % pour l’ensemble des Canadiens.
Quant aux établissements de santé, c’est évidemment leur mission qui leur impose de favoriser les saines habitudes de vie et le non-tabagisme. Cela est loin d’être impossible. En effet, l’expérience montre que de telles politiques « suscitent souvent de grandes appréhensions avant leur implantation, mais qu’elles ne créent pas de réelles difficultés une fois qu’elles sont implantées », écrit le Ministère dans le document destiné aux établissements postsecondaires.
D’ailleurs, plusieurs établissements vivent déjà sans fumée, dont le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) et le Centre jeunesse de Montréal – Institut universitaire. L’Institut universitaire en santé mentale Douglas vient, quant à lui, de fermer l’ensemble de ses fumoirs tandis que l’Université McGill et le Cégep de l’Abitibi-Témiscamingue ont des résidences étudiantes sans fumée.
De l’aide pour s’y retrouver
Pour concevoir et implanter leur politique, les établissements peuvent faire appel aux directions de santé publique (DSP) à travers le Québec. Celle du Centre intégré universitaire de santé et de services sociaux (CIUSSS) du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, par exemple, a mis à jour l’outil Devenir un établissement sans fumée en y intégrant les nouvelles obligations pour les établissements qui découlent de la Loi concernant la lutte contre le tabagisme. Cette DSP a aussi lancé un appel de projets qui a permis de verser entre 3500 et 15 000 $ à 10 établissements. « L’objectif était de financer les ʻʻpetits plus’’ qui permettront à leur politique sans fumée d’être bien reçue par la clientèle et les employés, dit Valérie Lemieux, agente de planification, de programmation et de recherche. Par exemple, imprimer des affiches, retirer les cendriers ou organiser un événement pour souligner l’entrée en vigueur de la politique. »
Au CIUSSS de la Capitale-Nationale, l’équipe de la DSP peut notamment présenter aux établissements les options qui s’offrent à eux, leur expliquer les étapes nécessaires à la conception d’une politique ou revoir cette dernière avec eux. Enfin, la DSP du Centre intégré de santé et de services sociaux de Lanaudière proposera dès cet automne de l’aide pour élaborer ces politiques et même de la formation en cessation tabagique pour les infirmières qui travaillent dans les cégeps de la région.
Vers un environnement plus sain
Devenir un établissement sans fumée exige à la fois d’interdire l’usage du tabac, de créer une nouvelle norme sociale de non-tabagisme et de favoriser la cessation tabagique chez le personnel et les usagers. Pour y arriver, la première étape consiste à désigner une personne responsable du dossier. Celle-ci devra avoir le soutien de la direction et pouvoir compter sur une équipe constituée de toutes les parties prenantes (fumeurs, non-fumeurs, étudiants, employés, etc.). La deuxième étape? Dresser un état de la situation, c’est-à-dire déterminer à quels endroits l’on fume dans l’établissement, à quels moments, quels types de soutien à la cessation existent, etc. Avec ces données en main, l’équipe peut alors décider des mesures à mettre en place, d’une stratégie de communication et d’un échéancier.
Pour que les employés et usagers adhèrent pleinement à la nouvelle politique, le MSSS recommande également aux établissements de mener des consultations, de faire preuve d’une grande écoute et de prévoir de l’accompagnement. Des ressources doivent aussi être prévues pour évaluer cette politique. En effet, le directeur général de chaque établissement devra présenter tous les deux ans un rapport sur cette question au conseil d’administration et au MSSS. Enfin, précisons que, si le Ministère exige que les établissements lui soumettent une politique sans fumée au plus tard le 26 novembre 2017, il laisse l’échéancier du projet à leur discrétion.
Espaces fumeurs extérieurs et temporaires
De manière très concrète, le MSSS avise aussi les établissements qu’ils peuvent maintenir des zones fumeurs à l’extérieur s’ils le souhaitent. Celles-ci doivent toutefois être situées dans un endroit peu visible et à l’écart, à neuf mètres ou plus des portes, fenêtres et prises d’air. De plus, les établissements devraient prévoir d’éliminer complètement ces zones fumeurs un jour.
De plus, les documents d’orientation du MSSS recommandent que les cégeps et universités ayant encore des liens financiers avec l’industrie du tabac considèrent y mettre fin : par exemple, que les fonds de retraite liés à l’établissement ne détiennent plus d’actions de ces compagnies; que l’administration interdise la présence des cigarettiers dans les foires d’emploi et qu’elle prohibe toute subvention de recherche provenant de cette industrie. Le Ministère fait également des recommandations spécifiques aux établissements de santé. Par exemple, que les CHSLD, qui peuvent encore offrir jusqu’à 20 % de chambres « fumeurs », songent à les éliminer graduellement. Le MSSS recommande, en outre, de fermer tous les fumoirs qu’il reste dans le réseau de la santé et de sensibiliser les milieux familiaux et les ressources intermédiaires à la question du tabagisme. Enfin, le Ministère propose des guides et exemples de politiques desquels les établissements peuvent s’inspirer. Parce que, avec un engagement fort et une bonne préparation, devenir un établissement sans fumée est une mission plus que possible.
Anick Labelle