Une Loi sur le tabac améliorée pour le Canada

La révision de la Loi sur le tabac introduit un premier règlement sur les produits du vapotage et prépare l’arrivée de l’emballage neutre.

La Loi sur le tabac du Canada n’avait pas été revue en profondeur depuis 1997. Il était donc temps de réexaminer cette législation obsolète, âgée de plus de 20 ans, afin d’y intégrer les nouveaux produits du tabac et de mettre en place des mesures additionnelles de lutte contre le tabagisme. Déposé en novembre 2016, le projet de loi no S-5, Loi modifiant la Loi sur le tabac a été adopté en mai 2018.

La nouvelle Loi sur le tabac et les produits de vapotage comprend deux grands volets : un encadrement pour les produits de vapotage ainsi que de nouveaux pouvoirs réglementaires qui permettront de standardiser davantage les produits du tabac et leurs emballages. Avec l’adoption de la Loi, il est désormais permis de vendre aux adultes des cigarettes électroniques comportant de la nicotine, ce qui était jusqu’alors illégal, mais toléré. De nombreuses mesures visent toutefois à prévenir l’initiation des jeunes à ces produits, par exemple, l’interdiction de promouvoir des e-liquides parfumés avec des arômes de bonbon ou de boisson gazeuse. Cette interdiction inclut aussi toute mention sur l’emballage des e-liquides.

Publicités permises

Le projet de loi initial permettait que les produits de vapotage soient annoncés avec des publicités « style de vie ». Cependant, la ministre fédérale de la Santé a entendu les arguments des groupes de santé et fini par avouer qu’elle partageait à ce sujet les préoccupations de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. Comme c’est déjà le cas pour le tabac, la Loi interdit donc d’associer les produits du vapotage au prestige, aux loisirs, à l’enthousiasme ou à l’audace, par exemple.

Même si elles ne sont pas des publicités « style de vie », les publicités en ligne pour des produits du vapotage Vype, d’Imperial Tobacco Canada, attirent l’oeil.

Cela dit, la Loi permet certaines publicités pour les produits du vapotage et ne restreint pas les lieux où elles peuvent être diffusées. Des publicités pour les cigarettes électroniques pourraient donc apparaître à la télévision, à la radio, sur Internet ou dans les abribus et les arénas. Le Québec échappera toutefois à cela parce que la Loi concernant la lutte contre le tabagisme va plus loin que la loi fédérale. De fait, la loi provinciale limite aux points de vente et aux « journaux et magazines écrits dont au moins 85 % des lecteurs sont majeurs » les publicités pour les produits du tabac et du vapotage qui sont destinées au grand public. Et encore, celles-ci sont soumises à de nombreuses conditions.

La Loi sur le tabac et les produits de vapotage donne aussi au gouvernement fédéral de nouveaux pouvoirs pour réglementer l’apparence des produits du tabac, ce qui facilitera l’adoption d’un emballage plus standardisé. Enfin, la Loi exige que la ministre fédérale de la Santé dépose dans quatre ans, ainsi que tous les deux ans par la suite, un rapport sur les dispositions et l’application de la Loi, ce qui devrait aider à procéder plus rapidement aux ajustements nécessaires.

Malgré cette mise à jour importante de la Loi, plus d’un groupe de santé est resté sur sa faim. « La Loi n’a pas fait l’objet d’un examen complet, regrette Flory Doucas, codirectrice et porte-parole de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. Par exemple, alors que la Loi sur le tabac et les produits de vapotage cherche à réduire la valeur promotionnelle des emballages en les standardisant davantage, elle permet encore la publicité aux endroits réservés à des adultes, comme les bars, ainsi que les étalages dans les zones franches (duty-free). »

Réactions des cigarettiers

Les cigarettiers n’ont pas tardé à réagir à l’adoption de cette nouvelle Loi. JTI-Macdonald et Imperial Tobacco Canada ont tous deux dénoncé l’emballage neutre comme étant une mesure inefficace, alors qu’au contraire une méta-analyse sérieuse, publiée en avril 2017, montre que ce type d’emballage pourrait contribuer à réduire le tabagisme. En légalisant les produits de vapotage, le projet de loi S-5 a aussi ouvert la porte à leur commercialisation. Imperial Tobacco Canada n’a pas perdu du temps : le 31 mai, à l’occasion de la Journée mondiale sans tabac, il a lancé une gamme de produits « potentiellement moins nocifs que la cigarette », incluant des cigarettes électroniques. Un événement qui n’a rien pour rassurer la santé publique. Heureusement que, dans quatre ans, la ministre de la Santé devra examiner à nouveau la Loi sur le tabac et les produits de vapotage!

Anick Labelle