Succès éclatant et immédiat de la politique sans fumée de Cadillac Fairview

C’est le dimanche 1er mars qu’est entrée en vigueur l’interdiction de fumer dans cinq centres commerciaux de Cadillac Fairview de la région de Montréal, soit le Centre Eaton, les Galeries d’Anjou, le Carrefour Laval, les Promenades St-Bruno et le centre Fairview Pointe-Claire.

Contrairement aux craintes exprimées par certains journalistes, la clientèle s’est immédiatement et presque totalement pliée à la nouvelle politique du gestionnaire immobilier. Lors de nos visites aux Galeries d’Anjou et au Centre Eaton, les fumeurs distraits ou récalcitrants étaient très difficiles à trouver.

La transformation la plus frappante a été notée à l’aire de restauration du Centre Eaton, rempli au maximum vers 13h mercredi, sans aucune cigarette ni fumée détectable. « C’est un miracle, a déclaré le directeur du centre, Louis Bélanger. La transformation s’est avérée très facile. Le respect total de la politique est renversant. On ne s’attendait vraiment pas à ce que cela aille si bien. »

M. Bélanger rapporte n’avoir reçu aucune plainte à son bureau au sujet de l’interdiction de fumer, ni en personne, ni par téléphone et ni par écrit. Aucun commerçant ni client ne s’est donné la peine de communiquer avec la direction du Centre Eaton à ce sujet.

« J’ai été surprise du peu de protestations des fumeurs, a aussi constaté Joanne Eccles, une non-fumeuse qui dînait au Centre Eaton. C’est plus agréable maintenant. » Sa collègue Linda Santangielo a admis elle aussi apprécier l’aération sans fumée, bien qu’elle soit indifférente à la fumée des membres de sa famille à la maison.

Quelques exploitants de comptoirs alimentaires spécialisés en beignes, muffins ou cafés, ont toutefois affirmé à Info-tabac avoir perdu environ 30 % de leur chiffre d’affaires. Cela s’explique en partie du fait que les fumeurs des bureaux voisins ne peuvent plus venir y prendre leurs pauses-cigarettes. De plus, la semaine de relâche scolaire entraîne normalement une baisse des ventes dans les centres commerciaux, a expliqué M. Bélanger.

C’est aux Galeries d’Anjou que s’est manifestée la seule petite poche de résistance, improvisée par les enjoliveurs de pauses-cigarettes, tels que Mmmuffins, La Cafeterie et Café Dépôt, lesquels disposent de tables dans les aires communes touchées par l’interdiction. Le 1er mars, ces trois commerçants continuaient à offrir des cendriers aux fumeurs. Constatant le respect total de la politique ailleurs dans le centre et avertis officiellement par la direction des Galeries d’Anjou, ils ont accepté de battre en retraite dès le lendemain. Le gérant de La Cafeterie, apparent meneur du groupe, a refusé d’être photographié par Info-tabac, affirmant « ne pas vouloir monter aux barricades ».

La directrice du marketing du portefeuille de l’est du Canada chez Cadillac Fairview, Agnès Velenosi, s’est avouée ravie et agréablement surprise de la réaction positive des clients. « Depuis dimanche, nous n’avons reçu que des félicitations au siège social du portefeuille. Quant à la préposée au kiosque de renseignements des Galeries d’Anjou, elle a noté 10 commentaires des clients, 8 positifs et 2 négatifs. »

La politique de Cadillac Fairview a été implantée de manière très professionnelle. En plus du lancement lors de la Semaine québécoise sans fumer, deux séries d’affichages respectueux, clairs et abondants ont été prévus. Quant aux quelques fumeurs vraiment distraits, neuf sur dix écrasent rapidement sur réception du carton de rappel remis par les employés d’entretien ou de sécurité. Les échanges agressifs sont extrêmement rares, a rapporté Mme Velenosi.

Le quotidien The Gazette, qui titrait faussement « Smokers ignore mall ban » le lundi 2 mars, avait déniché une fumeuse de 15 ans, Isabelle Boutin, refusant d’écraser au centre Fairview Pointe-Claire. « Je trouve qu’ils capotent. C’est acceptable de ne pouvoir fumer dans les magasins, mais dans l’aire de restauration aussi? C’est ridicule », aurait-t-elle dit au journaliste. Commentant la déclaration de cette jeune fille, M. Bélanger a estimé qu’il s’agissait d’un cas isolé. « C’est justement pour elle qu’on a fait ce règlement », a-t-il laissé tomber, lui-même père de deux adolescentes.

L’heureuse initiative de Cadillac Fairview fera-t-elle des petits? Non, probablement des gros! La division québécoise de l’International Council of Shopping Centres est en relations avec Lise Bourcier, de l’Opération espaces sans fumée du CQTS, afin d’implanter d’autres centres commerciaux sans fumée au Québec. Le président de cette division, qui regroupe la plupart des grands centres commerciaux du Québec, a lui aussi l’intention d’écrire au premier ministre Bouchard pour s’assurer que la loi antitabac n’oublie pas d’inclure son industrie. Entre-temps, la transformation des autres établissements se ferait par région, a expliqué Mme Bourcier.

Denis Côté