Québec accroît les services offerts aux fumeurs

C’est sans tambour ni trompette que le ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) a lancé une campagne publicitaire pour faire connaître ses services de cessation tabagique. Cette démarche s’intègre au Plan québécois d’abandon du tabagisme (PQAT), un nouveau modèle organisationnel mis en place, au coût de 4,7 millions $. L’objectif est d’améliorer la qualité et la disponibilité des programmes offerts dans chacune des régions du Québec.

« Grâce à cette nouvelle approche, les fumeurs seront mieux informés des divers services qu’ils peuvent utiliser pour réussir leur cessation tabagique », affirme la directrice du Service de lutte contre le tabagisme, Lise Talbot. Si certaines régions proposaient déjà des programmes pour arrêter de fumer, le PQAT assure dorénavant la gratuité, l’uniformité et la promotion des services offerts à la grandeur de la province.

Aux fumeurs souhaitant rompre avec la cigarette, le plan du MSSS propose trois principaux outils soit : un site Internet, une ligne téléphonique, de même que ses tout nouveaux Centres d’abandon du tabagisme. Surtout axés sur la consultation, ces services fournissent informations, soutien et suivi aux personnes qui en font la demande.

Les programmes du Ministère offrent aux fumeurs trois types d’interventions. Une intervention brève détermine la motivation d’un individu à cesser de fumer et le conseille, une intervention complète dresse, en plus, l’historique de ses précédentes tentatives d’arrêt et le soutient dans sa démarche. Effectuée sur une base volontaire, l’intervention intensive assure le suivi du fumeur au cours des différentes étapes qu’il traverse.

Nouveaux Centres d’abandon du tabagisme

Plus de 125 Centres d’abandon du tabagisme (CAT) ont vu le jour au Québec, depuis presqu’un an. Outre les 900 000 $ consacrés à leur promotion, 2,1 millions $ ont été octroyés par le MSSS pour leur implantation.

Dans ces établissements, des consultations individuelles et de groupe sont offertes aux personnes qui souhaitent arrêter de fumer. Ces dernières obtiennent des renseignements sur les aides pharmacologiques, l’alimentation, l’exercice physique, les façons de gérer leur stress et les raisons qui devraient les motiver à devenir non-fumeuses. Ce sont des infirmières, psycho-éducateurs, inhalothérapeutes ou travailleurs sociaux, ayant reçu une formation, qui animent ces rencontres. Même si la proportion de fumeurs qui délaissent le tabac semble augmenter en fonction de la durée et de la fréquence des rendez-vous, le Ministère ne détient actuellement aucun chiffre à cet effet.

Pour ceux que ces séances rebutent, les Centres d’abandon du tabagisme proposent également des conseils par téléphone ou en personne, de même que des dépliants informatifs. Les CAT sont principalement établis dans les CLSC, quelques centres hospitaliers et cliniques médicales. Ils sont régis par les directions de santé publique (DSP) régionales.

Encore méconnus de la population, les Centres d’abandon sont jusqu’à maintenant peu fréquentés, selon plusieurs intervenants régionaux. À la fin octobre, bon nombre de CAT n’avaient toujours pas reçu leur matériel de promotion régionale ni amorcé leur campagne publicitaire. S’il est trop tôt pour estimer à combien de personnes profiteront les CAT, des CLSC offrant des services similaires accueillaient par le passé une centaine de fumeurs annuellement. En Montérégie, où l’efficacité de groupes d’entraide pour cesser de fumer a été évaluée, 44 % des participants étaient toujours non-fumeurs un an après leur date de cessation. On peut présumer que les CAT obtiendront autant de succès.

Ligne J’ARRÊTE!

Gérée à part égale par la Société canadienne du cancer et le Conseil québécois sur le tabac et la santé (CQTS), la ligne J’ARRÊTE! est en opération depuis janvier 2002. Du lundi au vendredi, entre 8h et 20h, les fumeurs n’ont qu’à composer le 1-888-853-6666 pour obtenir une aide personnalisée ou être redirigés vers les ressources disponibles dans leur région.

« Lorsque nous recevons un appel, il faut d’abord identifier les besoins de la personne qui est au bout du fil, indique Sylvie Foucault, coordonnatrice du service. Si elle souhaite être conseillée, nous déterminerons son profil tabagique et la guiderons adéquatement. Nous pourrons lui proposer des aides pharmacologiques, de la documentation ou simplement du soutien. »

Au centre téléphonique, 13 intervenants (7 à temps plein et 4 à temps partiel) se chargent de la réception des appels et du suivi des gens ayant sollicité un accompagnement. Les fumeurs abstinents sont libres de téléphoner aussi souvent qu’ils le désirent, en cas de besoin, alors que les téléphonistes peuvent contacter jusqu’à huit fois une même personne.

Les agents de la ligne J’ARRÊTE! ont traité plus de 6 000 appels depuis janvier 2003. Le service, qui a noté une hausse de son achalandage à la suite de la récente campagne publicitaire, reçoit approximativement 100 appels par jour. Plus enclines à demander de l’aide, les femmes sont deux fois plus nombreuses que les hommes à téléphoner.

Le site J’ARRÊTE! : un « clic » vers la santé

Situé au www.jarrete.qc.ca, le site Internet J’ARRÊTE! est spécialement conçu pour les fumeurs. Disponible en deux versions (pour adultes et pour adolescents), il se veut « Le site pour s’aider à se libérer du tabac ». Les accros de la nicotine ont la possibilité d’utiliser cet outil interactif pour cheminer à leur rythme en suivant, via le Web, chaque étape de leur sevrage. Ce site fournit une foule de renseignements, tant sur la dépendance que sur les motifs qui incitent habituellement les gens à fumer. Il a reçu plus de 100 000 visites depuis son inauguration en janvier 2003.

Les futurs non-fumeurs qui ont besoin d’être épaulés, n’ont qu’à remplir un formulaire en ligne afin d’être conseillés par courriel. Un nouveau service de consultation en direct leur permet également de communiquer avec des spécialistes de la cessation, par le biais de « vidéo-cam » ou lors de séances de clavardage (chat) individuelles.

De plus, les membres inscrits au site ont accès à un forum de discussions et un chat. Ils peuvent échanger, entre eux, sur les difficultés et les réussites rencontrées pendant leur renonciation au tabac.

Parmi les trois services d’abandon du tabagisme du MSSS, le site Internet serait, en raison de sa dynamique, celui qui peut réussir le mieux à rejoindre les jeunes. « Les adolescents qui fument vont préférer des moyens de cessation individuels nécessitant le moins de temps possible », commente Anne Chabot, spécialiste en cessation à la DSP de Laval. Toutefois, selon le directeur du CQTS, Mario Bujold, « aucune donnée ne permet actuellement d’évaluer l’âge des internautes qui fréquentent le site J’ARRÊTE! ».

Influence des médecins

Les professionnels de la santé sont, en outre, invités à jouer un rôle d’influence en intervenant minimalement. On leur suggère notamment d’identifier leurs patients fumeurs par une mention au dossier, et de les encourager à cesser de fumer. Puisque l’intervention tabagique n’est actuellement pas reconnue comme un acte médical et que les médecins ne sont pas rémunérés s’ils discutent du tabac lors d’une consultation, cette pratique est laissée à leur discrétion. Toutefois, le Ministère envisage d’entreprendre les démarches nécessaires pour corriger la situation.

Une exception à la règle, du côté de la Mauricie – Centre-du-Québec, « les intervenants des Centres d’abandon du tabagisme ne chôment pas, affirme le répondant-tabac, Jean-Maurice Roy, d’un ton satisfait. Lorsque les CAT ont été implantés en région, nos professionnels de la santé ont immédiatement introduit l’intervention minimale (dépistage du patient fumeur avec mention au dossier) dans leur pratique courante. Les fumeurs déjà aux prises avec des problèmes de santé sont donc sensibilisés et dirigés vers les Centres d’abandon ».

Budget reconduit

Le gouvernement du Québec a investi 1, 7 million $ en 2002-2003 pour publiciser et soutenir la ligne et le site Internet J’ARRÊTE! Près d’un demi-million $ a servi à financer la campagne d’affichage et le message télévisé au cours duquel un fumeur affirme qu’il a trouvé les outils pour s’aider à cesser de fumer. De plus, le budget des CAT a été reconduit pour l’année 2003-2004.

En constante évolution, le PQAT sera évalué au terme de sa première année d’implantation. Les services qu’il propose seront, bien sûr, améliorés en fonction de leur achalandage et des besoins spécifiques de certaines clientèles. Alors que la première phase de la campagne publicitaire se terminera en décembre, le Ministère pourra compter sur la médiatisation de la Semaine pour un avenir sans tabac et du Défi « J’arrête, j’y gagne! » 2004.

Josée Hamelin