L’OMS constate que des milliards de personnes fument du tabac sans le vouloir

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a publié le 9 décembre son 2e rapport sur l’épidémie mondiale de tabagisme. L’édition de 2009 est consacrée aux lois qui interdisent de fumer dans les milieux de travail et les espaces publics, dans divers pays.

De telles législations existent dans certains États de la planète, mais couvrent rarement la totalité de ces lieux, comme c’est le cas au Québec, par exemple. Une telle protection ne couvrait que 5,4 % de la population mondiale, à la fin de 2008, au moment de la compilation par l’organisme international de santé publique basé à Genève.

Même en tenant compte de l’Inde, un pays de plus d’un milliard d’âmes, qui a en 2009 étendu l’application d’une interdiction de fumer à ses hôtels, restaurants, cafés, bars, stades et autres lieux, l’OMS pourrait encore affirmer sans risque que l’écrasante majorité de la population du globe est peu protégée du tabagisme passif.

Pire qu’un tsunami

Or, l’OMS calcule que cette exposition à la fumée de tabac d’autrui « provoque environ 600 000 décès prématurés par an, d’innombrables maladies invalidantes et des pertes économiques annuelles qui se chiffrent en dizaines de milliards de dollars ». Ces 600 000 non-fumeurs qui meurent prématurément d’avoir inhalé la fumée de tabac des autres ont surtout tort, médiatiquement parlant, de ne pas mourir en une seule journée. À titre de comparaison, les attentats du 11 septembre 2001 à New York et Washington ont tué 2 992 personnes, et le tsunami du 26 décembre 2004 dans l’océan Indien en a tué près de 444 000.

« Il n’existe pas de seuil au-dessous duquel le tabagisme passif est sans danger », fait remarquer le Dr Ala Alwan, le vice-directeur général de l’OMS chargé des maladies non transmissibles et de la santé mentale.

La Convention-cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (CCLAT), maintenant ratifiée par 167 États souverains, et dont l’organisation genevoise réclame la mise en œuvre depuis février 2005, ne va cependant pas jusqu’à prévoir la protection légale des non-fumeurs à leur domicile. L’article 8 de la CCLAT et ses directives d’application ne concernent que les milieux de travail intérieurs et des lieux publics. Quand pareille interdiction sera en vigueur partout, le genre humain ne sera pas encore au bout de ses peines. L’exposition au tabagisme passif à domicile est elle aussi à l’origine de nombreux méfaits, entre autres des otites, de l’emphysème, des infarctus et des cancers.

Quelques consolations

Le deuxième Rapport de l’OMS sur l’épidémie de tabagisme, financé comme celui de février 2008 par le philanthrope new-yorkais Michael Bloomberg, contient aussi de bonnes nouvelles.

Moins de deux ans après son premier rapport du genre, l’OMS est fière de signaler que cinq pays se sont ajoutés à ceux qui obligent l’impression de mises en garde sanitaires illustrées sur les paquets de cigarettes; trois pays ont joint les rangs de ceux qui offrent une aide complète à l’arrêt tabagique, et six pays se sont ajoutés à ceux où les taxes comptent pour plus de 75 % du prix de vente au détail d’un paquet de cigarettes.

Il y a maintenant 51 pays sur Terre qui imposent sur chaque paquet un fardeau de taxe supérieur à celui appliqué en moyenne au Canada (65 %). C’est le cas, par exemple, de l’Argentine, du Maroc, de l’Algérie, du Bangladesh, de l’Allemagne et de l’Italie. Quant aux déboursés des acheteurs français et britanniques de cigarettes, ils vont à 80 % au Trésor public, un chiffre qui atteint 94 % dans le cas des Polonais.

Pierre Croteau