Les règlements touchant les cigarillos et la publicité du tabac entrent en vigueur

Les règlements québécois touchant la mise en marché des cigarillos et la publicité des produits du tabac ont finalement été adoptés en juin par le Conseil des ministres. Leur date d’entrée en vigueur est le 24 juillet. Le contenu de ces règlements est similaire à ce qui avait été publié dans la Gazette officielle du Québec le 5 mars, sauf que le gouvernement a accepté d’augmenter à 10 $ l’achat minimal de cigares ou de cigarillos. Néanmoins, cette clause ne sera effective que le 1er juin 2009 ; d’ici là, l’achat minimal sera de 5 $, tel que prévu initialement.

À cause des délais requis pour le montage des magazines, les dispositions sur la publicité imprimée ne s’appliquent qu’à compter du 7 septembre 2008.

Ces changements aux normes font du Québec la première province à dépasser la loi fédérale en matière de publicité du tabac. Info-tabac leur avait consacré la une de son dernier bulletin (Voir No 73, avril 2008, pages 1 et 2, titré : « Au Québec, la publicité des cigarettes et des cigarillos devra être discrète et terne »).

Les deux projets de règlement du 5 mars ont valu au gouvernement de recevoir 39 mémoires, en plus de 92 lettres ou courriels, a indiqué Marie-Claude Gagnon, relationniste du ministère de la Santé et des Services sociaux. Ils ont aussi suscité une sortie publique à la fois satisfaite et inquiète des groupes de lutte contre le tabagisme.

Branle-bas contre les cigarillos

En avril, le Conseil québécois sur le tabac et la santé, les Médecins pour un Canada sans fumée, la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac et l’Association pour les droits des non-fumeurs avaient sonné l’alarme devant l’éventualité que les cigarillos puissent continuer, malgré la nouvelle réglementation alors projetée, d’être le principal moyen d’initiation des jeunes au tabagisme. La consommation des cigarillos est aujourd’hui plus répandue que celle des cigarettes chez les adolescentes et les adolescents du Québec.

Les quatre groupes de lutte contre le tabagisme ont déploré le fait qu’il n’était pas nécessaire au consommateur, même avec le projet de réglementation publié le 5 mars, d’acheter 20 cigarillos d’un seul coup, ni même 10 d’un seul coup. La réglementation projetée précisait que l’interdiction des emballages de produits du tabac de moins de 10 unités cessait de s’appliquer à un emballage vendu à un coût supérieur à 5 $.

Les groupes ont réclamé que les cigarillos soient traités comme les cigarettes, et ont proposé qu’ils ne puissent pas être vendus autrement que 20 à la fois. La Coalition québécoise pour le contrôle du tabac a pu montrer une copie d’une lettre adressée à Santé Canada et révélant le point de vue d’un distributeur de cigarillos sur un produit distribué par un concurrent : « Ledit produit a toutes les caractéristiques d’une cigarette, sauf (que) sa couleur est foncée.»

Pour le Dr Fernand Turcotte, professeur émérite de la Faculté de médecine de l’Université Laval, le fait pour les cigarillos d’avoir une enveloppe composée en partie de tabac, au lieu d’une enveloppe entièrement en papier, ne les rend pas moins toxiques ou moins capables de générer une dépendance. Le Dr Turcotte précise que « la fumée des cigarillos dégage autant sinon plus de nicotine et significativement plus de goudron que la fumée de cigarettes ».

Flory Doucas, directrice québécoise des Médecins pour un Canada sans fumée, a fait valoir que quelques cigarillos ou cigarettes suffisent à créer une dépendance physiologique à la nicotine, et que la vente des cigarillos en petites quantités favorise une « expérimentation » qui débouche sur cette dépendance. Près de Mme Doucas, dans la salle où se tenait la conférence de presse d’avril, on pouvait voir une annonce de cigarillos parue dans une revue destinée aux dépanneurs et proclamant « Disponible en paquets de 8 ou à l’unité pour générer encore plus d’expérimentation et d’achats impulsifs. »

Mario Bujold, du Conseil québécois sur le tabac et la santé, s’est insurgé contre « ces petits cigares aromatisés aux saveurs de bonbons ou de fruits, vendus à l’unité ». Il a affirmé que les cigarillos « ont, à eux seuls, fait augmenter le tabagisme chez les jeunes au Québec en très peu de temps, renversant la tendance à la baisse des dix dernières années. »

Le gouvernement Charest a opté pour un emballage minimal de 10 $, peu importe le nombre d’unités, tout en laissant un an à l’industrie pour s’adapter.

Pierre Croteau