Les cigarettiers devront répondre de leurs actes

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La Cour suprême du Canada a refusé de se prononcer sur la constitutionnalité de la loi québécoise visant à récupérer le coût des soins de santé liés au tabac. Une décision qui confirme la validité du procès engagé par Québec contre les cigarettiers.

Durant des décennies, les cigarettiers ont dit sur la place publique qu’ils ignoraient si leurs produits causaient le cancer alors que, dans les faits, ils le savaient très bien. Pendant ce temps, des centaines de milliers de Québécois sont tombés malades des suites de leur tabagisme, ce qui a engendré des coûts importants au système de santé et à la société. Aujourd’hui, le Québec et d’autres provinces canadiennes tentent de récupérer ces sommes auprès des cigarettiers en adoptant des lois qui faciliteront leurs recours devant les tribunaux. Un pas de plus a été franchi en mai, quand la Cour suprême a refusé d’entendre JTI-Macdonald, qui voulait contester la constitutionnalité de la loi québécoise.

Un accusé, deux procès

Il y a présentement deux procédures judiciaires engagées contre les cigarettiers au Québec. La première, menée par le gouvernement du Québec, vise à récupérer les sommes dépensées en soins de santé pour des maladies liées au tabac. La deuxième est constituée de deux recours collectifs. Ce procès, entamé en 1998, oppose les fabricants de tabac à environ un million de fumeurs québécois dépendants de la nicotine ou devenus malades à la suite de leur tabagisme. Ce deuxième procès a déjà fait l’objet d’un premier jugement favorable aux victimes, en juin 2015. Les cigarettiers ont toutefois porté ce jugement en appel. La Cour d’appel entendra donc cette cause en novembre. Bien que la procédure entamée par le gouvernement du Québec soit distincte des recours collectifs, ces deux procès se complètent. Ainsi, le jugement favorable aux victimes dans les recours s’appuyait notamment sur la LRCSS. Le fait que la Cour suprême ait confirmé la constitutionnalité de cette loi desservira vraisemblablement les cigarettiers en novembre, lorsque l’appel qu’ils ont déposé sur le jugement des recours collectifs sera entendu.

Une responsabilité historique
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C’est Jean-Marc Fournier, alors ministre de la Justice du Québec, qui a déposé la poursuite du gouvernement contre les cigarettiers.

C’est en 2012 que le Québec a entamé une poursuite contre les cigarettiers. Son objectif : récupérer les 60 milliards de dollars dépensés en soins de santé de 1970 à 2030 pour soigner des maladies liées à la consommation de tabac. Pour ce faire, Québec a adopté la Loi sur le recouvrement des coûts des soins de santé et des dommages-intérêts liés au tabac (LRCSS). C’est celle-ci que JTI-Macdonald voulait contester en Cour suprême. Adoptée en 2009, cette loi vise à faciliter les poursuites judiciaires de type recours collectifs. Elle élimine notamment la prescription de la faute et permet de démontrer les méfaits du tabac avec des preuves statistiques ou épidémiologiques plutôt qu’avec les dossiers médicaux des victimes. Cette loi a déjà été sanctionnée par deux tribunaux : la Cour supérieure du Québec et la Cour d’appel du Québec. La Cour d’appel a reconnu que cette loi était « particulièrement sévère » envers les cigarettiers, mais a estimé qu’elle ne remettait pas en cause leur droit à un procès juste. La Cour suprême avait déjà confirmé, en 2005, la validité constitutionnelle d’une loi britanno-colombienne très similaire à celle du Québec. Ce n’est donc pas étonnant si la plus haute cour du pays a refusé d’entendre la requête de JTI-Macdonald sur cette question, sans justifier sa décision.

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Anick Labelle