La ligne j’Arrête fête ses dix ans

Une voix humaine au bout du fil
Dès 8 heures, chaque matin du lundi au vendredi, des personnes en chair et en os sont à pied d’oeuvre, avec le casque de conversation téléphonique sur la tête, prêtes à écouter, à renseigner et à soutenir les fumeurs ou leurs proches, dès que ces derniers composent le numéro 1 866 JARRETE.

Parfois, en particulier en janvier et en février, la personne qui appelle veut seulement connaître les modalités de participation au Défi « J’arrête, j’y gagne! ». Cependant, dans l’écrasante majorité des cas, les entretiens lors du premier appel d’un fumeur tournent à l’entretien motivationnel. Le possible futur ex-fumeur sent qu’il n’est pas un simple numéro et que son interlocuteur cherche à adapter son offre de renseignements et d’aide à la demande et aux besoins particuliers de l’appelant.

À la rencontre du fumeur

Après ce premier contact peuvent s’ajouter plusieurs appels de suivi proactif effectués par la petite équipe d’intervenants de la ligne j’Arrête, tel que convenu avec le fumeur. « Ça peut aller jusqu’à sept appels », souligne avec une pointe de fierté Isabelle Éthier, qui est la coordonnatrice du service depuis 2007. 

Les conversations durent généralement entre 10 et 30 minutes, et le service est toujours gratuit. Le personnel de la ligne répond aussi à des questions acheminées par courrier électronique et clavarde avec les visiteurs du site, où on trouve également de nombreux renseignements régulièrement mis à jour. 

Actuellement, ce sont 17 personnes qui se relaient pour satisfaire les besoins tout au long de la journée. Les intervenants et intervenantes reçoivent une formation de six à huit semaines et suivent aussi un programme de perfectionnement continu sur des thèmes comme les aides pharmacologiques, la dépendance psychologique, l’écoute active et les relations avec la clientèle éprouvant des problèmes de santé mentale. 

Ces connaissances et ce savoir-faire justifient le personnel soignant des hôpitaux et des cliniques externes, de même que les intervenants des Centres d’abandon du tabagisme, de proposer très souvent à des fumeurs d’être accompagnés dans leur démarche de renoncement au tabac par les spécialistes de la ligne j’Arrête, en complémentarité des soins ou du counseling reçus. Quand le fumeur accepte la proposition, quelqu’un du service j’Arrête se charge de donner un ou des coups de fil.

Le personnel de la ligne téléphonique est à l’emploi de la division du Québec de la Société canadienne du cancer. Le service est entièrement subventionné par le ministère de la Santé et des Services sociaux, depuis la mise en œuvre du premier Plan québécois d’abandon du tabagisme en 2001. 

Rejoindre les deux sexes et tous les âges

Selon l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC), un sondage annuel de Statistique Canada, les Québécoises qui fument sont nettement moins nombreuses que du côté masculin (680 000 contre 890 000). Les femmes recourent cependant plus volontiers à la ligne j’Arrête que les hommes. Environ 64 % des appels concernent la gent féminine.

La clientèle qui bénéficie du service appartient indéniablement à tous les groupes d’âge. Par exemple, les mineurs et les personnes de 18 et 19 ans constituent 4 % des utilisateurs de la ligne, alors que les fumeurs de 12 à 19 ans comptent pour 7 % de l’ensemble de la population fumeuse au Québec, selon l’ESCC.

« Les jeunes fumeurs ont moins tendance à appeler », croit Isabelle Éthier. Celle-ci parle avec enthousiasme du nouveau Service de Messagerie pour Arrêter le Tabac (SMAT), qui permet aux personnes inscrites de recevoir de courts messages écrits sur leur téléphone mobile, des textos, provenant des spécialistes de la ligne j’Arrête. Le SMAT s’intéresse en particulier aux personnes de 18 à 25 ans. Or, durant le premier mois d’opération du SMAT, en décembre-janvier, il y a eu près de 700 inscriptions, et la moyenne d’âge des participants est de 25 ans. Un projet qui inclut l’utilisation de textos pour aider les 12-17 ans à cesser de fumer est également en développement au Conseil québécois sur le tabac et la santé.

À partir de juin, le numéro 1 866 JARRETE figurera sur tous les paquets de cigarettes vendus au Canada. Il y a tout de même 1,5 million de personnes qui fument la cigarette au Québec.

L’Organisation mondiale de la santé, sur la base d’observations de ce qui s’est passé dans certains pays, croit que les fumeurs, en voyant le numéro d’une ligne d’aide à l’arrêt tabagique d’aussi près et aussi souvent que le paquet de cigarettes lui-même, sont plus nombreux à téléphoner.

Pierre Croteau