Deux cigarettiers contestent en cour la Loi concernant la lutte contre le ‎tabagisme

Une « réglementation excessive » qui brime leurs droits constitutionnels. Voilà comment deux cigarettiers qualifient certaines des clauses de la Loi concernant la lutte contre le tabagisme adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale du Québec en novembre 2015.

Le 1er mars, Imperial Tobacco Canada (ITL) et Japan Tobacco International (JTI) ont déposé devant la Cour supérieure du Québec une requête introductive d’instance pour défendre leur droit de vendre un produit qui tue un client sur deux. Les deux cigarettiers contestent trois clauses de la nouvelle loi : l’interdiction de vendre des produits du tabac mentholés; l’obligation d’accorder une surface d’au moins 4,6 cm2 aux mises en garde sur les paquets de cigarettes et la prohibition de certaines promotions auprès des détaillants des produits du tabac.

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Interdire le menthol est inconstitutionnel, a avancé un porte-parole d’ITL dans le quotidien Le Devoir. Selon lui, cela relève d’Ottawa. « Le gouvernement fédéral a déjà une interdiction de saveur pour les produits du tabac, mais il a exempté les produits mentholés », a-t-il précisé. Rappelons que, dans la dernière année, l’Alberta, le Nouveau-Brunswick, l’Ontario et la Nouvelle-Écosse ont tous interdit les produits du tabac mentholés. La Nouvelle-Écosse a même été le premier territoire dans le monde à le faire. Selon des articles parus dans les médias, ITL aurait également déposé des poursuites contre ces provinces.

Une stratégie habituelle

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« Les demandes des compagnies de tabac n’ont aucun mérite, dit Rob Cunningham, analyste principal à la Société canadienne du cancer et avocat de formation. Imposer une surface minimale aux mises en garde est tout à fait légitime et ne touche aucunement la liberté d’expression des cigarettiers. Quant aux produits du tabac mentholés, la loi est complètement valide. » Les poursuites des cigarettiers n’étonnent pas Flory Doucas, codirectrice de la Coalition québécoise pour le contrôle du tabac. « C’est l’habitude de l’industrie du tabac que de contester toute loi qui menace sérieusement ses profits », a-t-elle dit. Toute loi, en somme, qui contribuera sérieusement à réduire les taux de tabagisme. Ces procédures légales poursuivent un autre objectif, ajoute Mme Doucas : dissuader d’autres territoires d’adopter des mesures similaires, même quand celles-ci sont solides et que les arguments légaux des compagnies ne tiennent pas la route.

Quelques jours avant les cigarettiers, l’Association québécoise des vapoteries a également déposé un recours contre la même loi provinciale. Cet organisme tout neuf regroupe une trentaine d’entreprises. Il soutient notamment que l’inhalation de toute substance relève du droit criminel et, donc, d’Ottawa. La loi contreviendrait aussi à l’obligation constitutionnelle de protéger la santé et la sécurité des personnes parce qu’elle limite l’usage d’un produit vraisemblablement moins dangereux que le tabac combustible. À suivre…

Anick Labelle