Actif ou passif, le tabagisme accroît le risque de cancer du sein

Dans le passé, les études publiées sur le lien possible entre le tabagisme et le cancer du sein étaient peu nombreuses et présentaient des conclusions divergentes; la plupart de ces études sont à présent dépassées.

Un groupe d’experts a été réuni par quatre agences canadiennes pour examiner en profondeur les éléments de preuve présentés dans les récentes études épidémiologiques et toxicologiques, et dans les analyses des mécanismes biologiques qui établissent un lien entre le tabagisme et le cancer du sein. Selon ces experts, le tabagisme actif et l’exposition à la fumée secondaire augmentent le risque de cancer du sein.

Le Programme québécois de dépistage du cancer du sein vise l’ensemble des femmes de 50 à 69 ans.

« La fumée du tabac contient 20 agents cancérogènes connus ou présumés associés au cancer du sein, et des mécanismes biologiques reconnus permettent d’expliquer comment l’exposition à ces agents cancérogènes peut provoquer un cancer du sein », écrivent les auteurs.

Kenneth Johnson, Anthony Miller, Neil Collishaw et leurs huit cosignataires concluent que « les liens de causalité sont établis entre le tabagisme actif et le cancer du sein, et entre la fumée secondaire et le cancer du sein chez les jeunes femmes, surtout chez les femmes pré-ménopausées qui n’ont jamais fumé ».

Les experts de ce groupe sont des spécialistes de l’Agence de la santé publique du Canada, de l’Unité de recherche sur le tabac de l’Ontario, de Médecins pour un Canada sans fumée et de Partenariat canadien contre le cancer.

Un article intitulé Active smoking and second-hand smoke increase breast cancer risk: the report of the Canadian Expert Panel on Tobacco Smoke and Breast Cancer résume leur rapport de 75 pages. Cet article, paru dans le journal Tobacco Control en janvier 2010, porte sur l’étude qui a été publiée en avril 2009.

Quelques conclusions de l’étude

Le groupe de 11 experts avait pour mandat de rédiger une synthèse des études récentes et des connaissances de pointe sur l’exposition à la fumée du tabac et le cancer du sein en examinant les recherches approfondies sur le tabagisme actif et le tabagisme passif, et leur lien avec le cancer du sein chez les femmes pré-ménopausées.

Les chercheurs ont découvert que le tabagisme accroît le risque de cancer du sein de 50 à 70 % en moyenne chez toutes les femmes, selon la quantité de cigarettes consommées.

« Même une exposition modérée à la fumée secondaire, comme c’est le cas des femmes qui vivent ou travaillent avec des fumeurs tôt dans leur vie, accroît chez la femme le risque de cancer du sein lorsqu’elle atteint la trentaine, la quarantaine et la cinquantaine », déclare le Dr Anthony Miller, spécialiste en santé publique de l’Université de Toronto et membre du groupe d’experts.

De plus, le groupe constitué de six experts canadiens et cinq experts américains affirme qu’une femme sur sept au Canada sera atteinte d’un cancer du sein au cours de sa vie et que cette proportion passe à une femme sur cinq chez les fumeuses.

Une interaction importante entre les antécédents de tabagisme et les antécédents familiaux de cancer du sein chez les parents au premier degré a été également observée, renforçant la théorie que le risque associé au tabagisme augmente chez les femmes ayant une prédisposition familiale marquée pour le cancer du sein. Une étude sur les femmes porteuses des gènes associés au cancer du sein révèle que celles qui fument plus d’un paquet de cigarettes par jour pendant cinq ans doublent leur risque de contracter un cancer du sein. 

En outre, l’exposition à la fumée secondaire accroît le risque de cancer du sein de 40 à 50 % chez les femmes plus jeunes, et surtout chez les femmes pré-ménopausées.

« On estime que 80 à 90 % des femmes ont été exposées à la fumée du tabac pendant leur adolescence et à l’âge adulte », déclare le président du groupe d’experts, Neil Collishaw, de Médecins pour un Canada sans fumée. « Ces femmes courent un risque accru d’être victimes d’un cancer du sein à cause de cette exposition. » À la lumière de ces découvertes, M. Collishaw, dans une lettre d’avril 2009 à la ministre fédérale de la Santé Leona Aglukkaq, a appelé cette dernière à «considérer l’inclusion de mises en garde contre le risque de cancer du sein par l’exposition à la fumée du tabac » dans une prochaine vague de mises en garde sanitaires revampées.

Recommandations

Le groupe d’experts a formulé plusieurs recommandations dans son rapport. La première préconise la poursuite des recherches en vue de soutenir et de consolider les données établissant le lien entre le cancer du sein et la fumée du tabac.

La deuxième recommandation souligne la nécessité d’élaborer une stratégie de communication plus globale sur la santé, axée particulièrement sur les jeunes femmes. « L’élaboration de meilleurs programmes d’information et de communication afin de mieux sensibiliser le public aux dangers du tabac est un aspect fondamental de la Convention-cadre pour la lutte antitabac de l’Organisation mondiale de la santé. »

Joey Strizzi