22 276 sympathisants de la SCC prient Québec d’en faire plus contre le tabac

Quand la Société canadienne du cancer mobilise
La Société canadienne du cancer (SCC) est un organisme philanthropique qui fait plus que secourir les cancéreux, soutenir leurs proches et subventionner la recherche scientifique.

Elle a aussi pour habitude de ne pas perdre de vue les gestes individuels et les politiques publiques qui pourraient prévenir les cancers, et qui préviendraient souvent du même coup un grand nombre d’autres maladies, chez une masse de nos concitoyens.

Un gel du marché du tabac pour empêcher l’industrie d’inventer de nouveaux produits ou de rendre ceux qui existent plus attirants pour les jeunes; des moyens pour combattre localement la distribution de produits de tabac non taxés, sans exclure de s’attaquer à la source du problème de la contrebande; et une interdiction de fumer dans un véhicule où prend place une personne de moins de 16 ans : voilà trois demandes formulées par la division du Québec de la SCC qu’ont endossées, durant l’été 2010, 22 276 signataires de lettres destinées au ministre de la Santé et des Services sociaux.

Ces milliers de lettres de citoyens ont été acheminées au ministre Yves Bolduc par le truchement de 52 élus du peuple à l’Assemblée nationale, appartenant à tous les partis. Entre le début de juin et la mi-août, un peu partout au Québec, des équipes de bénévoles et de conseillers de la SCC avaient aussi rencontré la moitié de ces députés dans leur circonscription pour leur remettre les paquets de lettres et souligner la pertinence des revendications présentées.

Les signataires de la lettre savent déjà que sept des dix provinces canadiennes ont adopté des lois pour protéger les mineurs à bord des automobiles et qu’une telle mesure recueillerait un appui massif des électeurs québécois (près de 80 % selon un sondage). « Même des fumeurs ont signé la lettre », ont renchéri de jeunes participantes à la campagne.

Les visites de députés ont reçu une abondante couverture dans les journaux régionaux, où le souci de la santé publique a enfin fait un bref contrepoids aux fréquentes lamentations de commerçants empêchés de vendre encore plus de tabac. (Voir note 1)

Inquiétude et déception

Lors d’un point de presse à Montréal le 2 novembre, le Dr Gilles Pineau, conseiller scientifique de la division québécoise de la SCC, a rappelé que « le tabagisme est responsable du tiers de tous les cancers au Québec » et est « à l’origine de la grande majorité des décès évitables ». « L’industrie [du tabac] ne dort pas », a ajouté le médecin, d’où la nécessité pour les citoyens soucieux de prévention de ne pas dormir non plus.

Tout en louant les efforts collectifs faits pour dépister le cancer du sein, Mélanie Champagne, qui est analyste des politiques pour l’organisme philanthropique, a tenu à rappeler que « le cancer du poumon tue deux fois plus de femmes au Québec que le cancer du sein » et que 85 % des cancers du poumon sont encore attribuables au tabagisme, d’où le bénéfice collectif de politiques qui préviennent systématiquement l’usage du tabac.

Réclamant une Loi sur le tabac « forte et énergique », le directeur des affaires publiques de la SCC au Québec, Marc Drolet, a déclaré que « le statu quo et le silence du gouvernement nous déçoivent. »

Près de la tribune, la presse pouvait « admirer » un étalement de cigarillos aromatisés, tels qu’ils étaient offerts auparavant et sont maintenant interdits, et de cigarillos aromatisés tels que permis par la législation fédérale entrée en vigueur depuis juillet. Leur extrême similarité témoignait à quel point l’industrie est déterminée à maintenir son offre sur le marché en dépit des vœux clairement exprimés du législateur.

« Les 22 000 lettres envoient un message clair : la population s’attend à ce que le gouvernement [du Québec, cette fois-ci] passe à l’action et pose des gestes courageux dans le but de protéger nos jeunes », affirmait Marc Drolet.

Pierre Croteau

Note [1] : Le nombre de cigarettes vendues dans le réseau légal a augmenté de 10,7 % au Québec en 2009 et a continué d’augmenter en 2010. (Sources : Santé Canada et les grands cigarettiers)